Quand une inondation se déverse dans un complexe linguistique

Le 29 mai 1996. À Timmins, la rivière Mattagami débordait sous l’effet des crues du printemps. De nombreuses demeures étaient inondées. La nouvelle était assez grosse pour attirer les grands journaux, même du Québec.


Les inondations à Timmins ont mérité que pour une rare fois, le journal la Presse de Montréal envoie un journaliste dans le Nord ontarien et y consacre une pleine page. C’est bienvenu. Sauf qu’après avoir donné les faits sur la crue de la rivière, le reportage se dilue dans d’autres eaux. Le journaliste constate qu’il y a des francophones à Timmins et que leurs conversations passent spontanément du français à l’anglais. Il observe que francophones et anglophones s’entraident dans la catastrophe sans trébucher sur leurs langues. Et ainsi de suite jusqu’à la toute dernière phrase de l’article, qui rapporte le cri du cœur d’un sinistré : « Ça c’est ma propriété, pis j’t’assez proud de ça. Oh my God ! »

Bon, un journaliste a perdu le fil de sa nouvelle. Il n’y a pas encore de quoi faire un plat. Mais le rédacteur du gros titre, lui – qui n’est probablement pas le journaliste lui-même – a vu dans cette remarque-là la phrase clef de l’article. Donc quel est le gros titre en gros caractères de cette grosse nouvelle ? Eh, oui : « C’est ma propriété et j’t’assez proud de ça », en caractères trop gros et gras pour qu’on puisse les manquer.

C’est vrai que c’est le genre de « franglais » qu’on entend parfois en Ontario. C’est vrai que ça peut laisser une drôle d’impression. Mais comment se peut-il que dans toute cette catastrophe naturelle, c’est ce détail-là qui vole la vedette ? Si j’allais faire un reportage sur un des grands festivals touristiques de Montréal et que je l’intitulais, en gros caractères, « Des mendiants dans toutes les rues », même si c’est tristement vrai, n’est-ce pas que j’aurais l’air tendancieux ? Voilà pourtant où en sont ces journalistes québécois qui n’ont pas pu parler d’une inondation sans la déverser dans leur complexe linguistique. Et nous revoilà, pour la combientième fois, victimes de cette attitude si agaçante que tant de journalistes québécois avant celui-ci ont manifestée. Quand par un gros hasard ils sont amenés à parler de nous, c’est uniquement pour finir par dire, peu importe le prétexte, que hors le Québec, tout finit par l’assimilation. Même les inondations. Mais jamais n’est-il question pour eux de lever le petit doigt contre ça. Car nous ne sommes pas du bon pays.

Le Québec est bien loin d’imiter ce qui s’est passé en Allemagne, ce pays divisé par le rideau de fer et pourtant resté si solidaire qu’il est réuni aujourd’hui. Pendant la guerre froide, l’Allemagne de l’Ouest a trouvé toutes sortes de façons de commercer avec l’Allemagne de l’Est, de la soutenir économiquement, d’y injecter des fonds, d’entretenir des liens étroits, même si son voisin était en principe un pays souverain et hostile. Une entraide semblable s’est pourtant déjà vue entre Canadiens-Français, à une autre époque. Au tournant du siècle, de vieilles paroisses du Québec faisaient des collectes quand de jeunes paroisses françaises de l’Ontario connaissaient des malheurs. De nos jours, ce ne sont pas des idées pareilles mais des moqueries qui viennent à l’esprit des Québécois, même si c’est en Ontario que se joue en premier « leur » bataille pour la survie du français en Amérique.

Chers cousins Québécois, vous pourriez, si vous vouliez, être indépendantistes et en même temps soutenir vos cousins Canadiens-Français. Vous pourriez être souverainistes sans nous abandonner tout à fait, et surtout sans nous rabaisser à chaque occasion pour soulager votre mauvaise conscience. Mais vous semblez bien loin d’adopter une attitude aussi mature, confiante et conséquente. C’est pour ça que je vous le dis en grosses lettres majuscules : Oh ! mon dieu, je ne suis pas fier de vous.

Le doigt d’honneur : court survol du doigt le plus long

Je me souviendrai toujours de la première fois que j’ai donné «le doigt». Je devais avoir 8 ans. J’étais dans l’autobus en route pour l’école quand un p’tit morveux dans un autre autobus m’a donné le doigt. J’ai instinctivement répliqué avec le mien à la grande surprise de la conductrice de l’autre autobus qui m’attrapa en plein acte. Ça n’a pas pris 2 minutes que notre autobus s’arrête et que Debbie, notre conductrice, chicane tout le monde au grand complet afin de savoir qui était le snoreau qui avait levé ce doigt sacré. Je n’ai jamais avoué ce geste publiquement avant aujourd’hui. Sorry Debbie.

Le majeur est un doigt, parmi tant d’autres, mais comment a-t-il eu sa si mauvaise réputation? Voilà le sujet de mon billet d’aujourd’hui.

On s’en est tous servi à un moment donné dans un élan de frustration en plein trafic ou en l’affichant en direction de quelqu’un qu’on méprise pendant qu’il avait le dos tourné.

“I wasn’t born with enough middle fingers to let you know how I feel.” — Proverbe inconnu

Récemment, c’est Adele au Brit Awards, MIA au Superbowl et Jacques Languirand lors du lancement de la programmation de Radio-Canada qui se sont laissé emporter par le majeur. Mais d’où vient-il?

Historique du doigt d’honneur

Les origines du doigt d’honneur sont un peu floues.

Une des premières utilisations connues du doigt d’honneur date de plusieurs siècles. En Grèce antique, il était connu sous le nom κατάπυγον (katapugon, de kata – κατά, « vers le bas » et pugē – πυγή, « fessier, derrière ») qui faisait référence à un geste phallique utilisé au théâtre comme insulte voulant dire un homme qui soumet à la pénétration anale. D’ailleurs, on y retrouve une référence dans la comédie Les Nuées d’Aristophane en 423 av. J-C.

Mais l’histoire qui m’allume le plus est celle de la Guerre de Cent Ans… les Français contre les Anglais.

L’amputation pendant la Guerre de Cent Ans

On est quelque temps entre 1337 et 1453. Les archers anglais adoptent le longbow sur le terrain de guerre contre les Français, ce qui leur permet d’atteindre une supériorité face à la cavalerie et aux arbalétriers français. Ça prend deux doigts pour tirer le longbow, l’index et le majeur. Les Français, pas cons, amputent le doigt du milieu des soldats anglais capturés pour qu’ils ne puissent plus tirer à l’arc s’ils s’échappent. Depuis, en réponse, les Anglais lèvent fièrement leurs majeurs en direction des troupes françaises avant une bataille dans l’idée de dire « Come and get ’em, boys! ». Et on pensait que nos chicanes entre « solitudes » étaient graves.

“The peace sign is just a trigger and a middle finger.” — Little Wayne

Du Moyen-Âge à la re-popularisation

Le doigt se fait discret au Moyen-Âge grâce à la présence de l’Église Catholique qui décourage fortement son utilisation. On le croirait mort jusqu’à ce qu’une nouvelle invention vienne mettre de l’huile sur le feu et place le majeur au sommet de sa popularité : la photographie.

Old Hoss Radbourn's Finger

En 1886, Charles « Old Hoss » Radbourn, lanceur de baseball pour les Boston Beaneaters, glisse son doigt dans une photo d’équipe. Dans un flash, le hall-of-famer lance un mouvement américain de rébellion et d’humour, bref, une attitude punk avant d’être punk. Charles Radbourn est le premier hipster.

Pendant le 20e siècle, le doigt d’honneur fait son entrée triomphante dans toutes les sphères de la société. Le doigt assume sa place dans la culture populaire et politique.

Nelson Rockefeller, vice-président des États-Unis, lève son majeur en guise réponse à des manifestants contre la guerre au Vietnam en 1976.

Autres doigts d’honneurs populaires

Le majeur, étrangement bien préservé, de Galilée peut être vu au Museo di Storia del Scienza en Italie. Le doigt du célèbre astronome a été volé du corps par Anton Francesco Gori en 1737. Gori aurait détaché ce souvenir pendant qu’il déménageait le corps. Galilée donne encore fièrement le doigt à tous ceux et celles qui douteraient de sa théorie héliocentrique.

Lors d’un passage de train à Salmon Arm en Colombie-Britannique, Pierre Elliott Trudeau n’a pas hésité un instant à donner son fameux « Trudeau Salute » à des manifestants qui lui criaient des bêtises antifrancophones en 1982. On aurait aimé avoir une photo de ça!

Une scène classique de The Matrix où M. Anderson refuse de coopérer avec Smith.

Cette photo classique de Johnny Cash a été prise par le prisonnier Jim Marshall pendant son concert à la prison San Quentin en 1970. Marshall, le photographe a dit qu’elle était “probably the most ripped off photograph in the history of the world.”

Personne ne sait vraiment quand est-ce qu’il a été tourné, mais chose certaine, c’était pendant qu’il était gouverneur du Texas et il ne savait pas que la caméra tournait. Ce clip a premièrement fait son apparition sur Salon.com en 2004.

Ce petit oiseau est loin d’être en voie d’extinction. Hissez-le fièrement, mais pas trop souvent. Limitez son usage qu’à des circonstances très précises. Le doigt d’honneur est sacré. Il ne faudrait pas l’abuser ni l’amadouer.

Quelles sont vos utilisations du doigt d’honneur préférées?

Lectures recommandées

Is giving the middle finger offensive? – NPR
101 Ways to Flip the Bird, Jason Joseph and Rick Joseph, 2007
The Field Guide to the North American Bird, Adam and Lauren Blank, 2004

Trou Story : Un gros trou démocratique

Il y a un vieux proverbe cri qui dit « Quand le dernier arbre sera abattu, la dernière rivière empoisonnée, le dernier poisson pêché, alors vous découvrirez que l’argent ne se mange pas. ». Voilà la citation à laquelle j’ai pensé après avoir vu le documentaire « Trou Story » de l’auteur-compositeur-interprète Richard Desjardins et du réalisateur Robert Monderie. Le duo nous avait offert « L’erreur boréale », qui portait sur l’industrie forestière, en 1999. Dans ce film coup-de-poing, l’équipe Desjardins-Monderie nous présente un portrait de l’histoire de l’industrie minière au Canada et au Québec. Ils jettent la lumière sur cette dernière à l’aide d’archives, de statistiques et de témoignages. Ils accusent les entreprises minières de récolter des profits exorbitants sans le moindre souci pour l’environnement, les travailleurs ou les populations affectées.

Le film nous emmène d’abord dans un voyage dans le temps guidé par des photos et des films du peuplement du Nord-Est ontarien et de l’Abitibi. On se penche sur la formation des mines de Sudbury (cuivre et nickel), Cobalt (argent) et Timmins (or) en Ontario, pour terminer avec celle de Rouyn-Noranda (cuivre et or) au Québec.

On constate que depuis leurs débuts, les mines constituent un grand moteur du capitalisme. Elles ont mené à la création d’empires et ont permis à un grand nombre d’industriels d’accumuler des fortunes immenses. On a notamment exhumé à Timmins, en Ontario, sept fois plus d’or que dans toute l’histoire du Klondike, une quantité équivalant aujourd’hui à 100 milliards de dollars.

Pendant des années, les mines ont pillé les ressources de la terre et pollué avec une impunité quasi-totale. Selon les réalisateurs, « La région entre Rouyn-Noranda et Val-d’Or est « l’une des plus importantes poubelles d’Amérique du Nord». Les vues aériennes de rivières et lacs pollués par les résidus sont sans équivoque. Pour ceux qui habitent autour des mines, on ne sait rien des conséquences sur la santé des métaux lourds. Au Canada, les normes de contamination n’ont pas été revues depuis 30 ans ».

Des conditions de travail effroyables

Par ailleurs, les entreprises minières ont exploité leurs travailleurs. Au début du siècle, la plupart des employés des mines étaient des immigrants venus d’Europe. Ils avaient des conditions de travail effroyables et couraient de grands risques. Ils travaillaient 10 heures par jour, six jours et demi par semaine, dans le fond des mines pour des salaires de misère. À cette époque, l’espérance de vie d’un mineur était de 46 ans.

Les risques pour la santé de la population étaient et demeurent énormes dans les régions minières. Pendant très longtemps, l’industrie a refusé de reconnaître le lien existant entre l’exposition à la pollution et le développement de maladies chez les mineurs. Plusieurs d’entre eux sont morts très jeunes sans jamais recevoir de dédommagement. Encore aujourd’hui, on recense un taux de plomb anormalement élevé dans le sang des résidents du quartier Notre-Dame, voisin de l’ancienne fonderie Horn, à Rouyn-Noranda. Les maladies respiratoires et les cancers y sont aussi monnaie courante.

À Malartic, dans le nord du Québec, des centaines de résidants ont été délogés de gré ou de force pour faire place à une gigantesque mine d’or à ciel ouvert. On va y extraire 55 000 tonnes de minerai du sol par jour. Et les habitants qui restent ne seront pas dédommagés pour leurs maisons et les risques à leur santé causés par le bruit et la pollution. « On peut rien dire, on sait rien », lance un habitant du secteur, inquiet comme ses voisins de voir apparaitre dans le paysage un trou gros comme 20 fois celui de la mine d’Asbestos. « La tour Eiffel va faire dans le trou, et on verra même pas le top… », illustre un autre citoyen.

Les mineurs ont lutté pendant 60 ans pour se syndicaliser et continuent à se battre aujourd’hui pour faire reconnaître leurs droits. Le film l’illustre bien avec l’exemple de la mine de Vale Inco à Sudbury. Les 3 500 travailleurs de cette mine ont fait la grève pendant un an, de juillet 2009 à juillet 2010, car l’entreprise refusait de renouveler leur convention collective s’ils n’acceptaient pas une détérioration importante de leurs conditions de travail. Malgré un bénéfice de 13,2 milliards de dollars américains réalisé en 2009, Vale insistait pour obtenir la mise en place d’un régime de retraite à deux vitesses, une réduction considérable de la prime de nickel et une détérioration importante des droits d’ancienneté, tout en engageant du personnel de remplacement pour continuer la production.

Des « bons citoyens corporatifs »

Alors qu’elles se vantent d’être des « bons citoyens corporatifs » et d’investir de façon importante au sein des communautés, les compagnies minières paient des impôts dérisoires. Les profits sont privatisés mais les dettes sont collectivisées.

Par exemple, à Sudbury, les mines ne paient pas pour les réservoirs d’eau, ni pour l’entretien des routes empruntées par les camions pour se rendre à la mine, qui restent à la charge des municipalités. De plus, très souvent, elles laissent aux gouvernements le fardeau de la décontamination des sites abandonnés. L’ancien maire de Sudbury, John Rodriguez, affirme qu’il a toujours dû « mendier » pour pouvoir financer les services publics. On compte actuellement 345 sites dits orphelins au Québec, dont la décontamination devrait coûter 264 millions $ au trésor public. Seulement pour la mine « Manitou » en Abitibi- Témiscamingue, il coûtera 50 millions $ pour décontaminer et réhabiliter le site abandonné par la compagnie. Si l’imposition est insupportable pour les compagnies minières, la charité leur semble tout à fait acceptable.

Partout dans le monde, lorsqu’une compagnie veut exploiter une mine, elle est tenue de payer des redevances pour compenser les habitants. Au Québec, le régime actuel prévoit que les minières versent 12 % de redevances sur les profits qu’elles réalisent. Si cela peut, à première vue, paraitre équitable, la réalité est tout autre. En avril 2009, un rapport du Vérificateur général du Québec a révélé que de 2002 à 2008, les compagnies minières ont extrait du sol québécois des métaux pour une valeur de 17 milliards de dollars. Quatorze d’entre elles n’ont versé aucune redevance, et les autres n’ont remis au trésor public que 259 millions de dollars, soit deux fois moins que ce qu’il en a coûté au gouvernement en infrastructures, en crédits d’impôt et en allégements fiscaux de toutes sortes.

Et si les gouvernements refusent d’accorder aux compagnies les privilèges qu’elles demandent, ces dernières vont tout simplement ailleurs ou pratiquent le chantage à l’emploi. Dans le cadre de la mondialisation et d’une économie libéralisée, elles peuvent facilement « délocaliser » leurs usines dans des pays moins regardants en termes de droits de l’homme, de droits sociaux ou de préservation de l’environnement, en exportant les minerais vers des sites de raffinage. Par exemple, les mines canadiennes vendent de plus en plus de minerai brut à la Chine, qui leur renvoie transformé, au double de sa valeur.

Pour Richard Desjardins, le constat est simple : « Pour nous, c’est une très mauvaise business, les mines. Dans certains pays comme la Norvège, l’État va toucher jusqu’à 50% des profits miniers. On est loin du compte, ici. »

Les Claims

Autre aberration soulignée par les réalisateurs : les « claims ». Dans le Québec d’aujourd’hui, pour acquérir un droit de propriété sur la ressource minière, une compagnie n’a qu’à placer un claim – réclamation – sur un territoire déterminé où elle croit pouvoir trouver de l’or, de l’argent, du fer, du zinc, du titane, du cuivre, des diamants ou autres métaux. Le claim équivaut à dire: « Je réclame le droit exclusif d’exploiter et de m’approprier la substance minérale que recèle ce terrain ».

Cette réclamation s’adresse au gouvernement, propriétaire en titre, au nom de la collectivité, de tout le sous-sol québécois. Automatiquement, le ministère des Ressources naturelles et de la Faune (MRNF) acquiesce. La compagnie se trouve ainsi en possession d’un droit minier. Par la suite, elle obtient facilement du MRNF un bail minier ou une concession minière. Une compagnie peut placer un claim aussi bien sur les terres publiques que sur un terrain privé. Un propriétaire ne peut s’opposer à l’intrusion sur son terrain d’un individu ou d’une entreprise en possession d’un droit minier.

En autres mots, toute entreprise détentrice d’un claim peut faire tout ce qu’elle veut sur ses terres sans rendre de comptes. La partie la plus habitée de l’Abitibi est sous claim. Soulignons que même si la propriété privée est érigée en valeur cardinale en Amérique du Nord, le sol et ses ressources restent un bien éminemment collectif au même titre que l’eau ou l’atmosphère, par exemple.

Collusion entre l’industrie minière et les gouvernements

Desjardins et Monderie accusent les gouvernements canadien, ontarien et québécois de complaisance et de complicité dans le saccage de nos ressources naturelles. Des gouvernements qui, selon les cinéastes, ont bradé sans sourciller nos richesses collectives en délivrant à bas prix « des permis de polluer ». Selon les réalisateurs, même le premier ministre canadien Wilfrid Laurier (1896-1911) aurait touché un pot-de-vin pour avoir favorisé l’exploitation minière. « Ça fait partie de l’histoire du Canada, ça. Il y a parfois une proximité troublante. Le premier ministre (Laurier) qui touche un chèque de 5000 piasses, c’en est une illustration assez flagrante! »

Réaction de l’industrie

Comme on aurait pu s’y attendre, l’industrie n’a pas très bien accueilli le film pamphlétaire de MM. Desjardins et Monderie. La porte-parole d’une entreprise minière les accuse d’avoir une vision passéiste. Elle reconnaît que dans le passé, les mines ont eu leurs torts, mais soutient que les choses se sont grandement améliorées depuis. Robert Monderie avance que les entreprises minières ont le devoir d’agir de façon responsable : « Aujourd’hui, les nouvelles mines ne peuvent plus déverser leurs résidus dans le lac, mais elles ne sont pas responsables des méfaits passés: tout ces résidus qui restent dans les nappes phréatiques, dont l’arsenic au fond du lac Témiscamingue, j’aimerais ça que les industries minières prennent la responsabilité dans la décontamination pour le milliard de dommages déjà causés. Le ministère des Ressources naturelles paie à leur place et leur collusion là comme ailleurs est inacceptable. »

Appel à la nationalisation de l’industrie

Desjardins et Monderie lancent un appel en faveur de la nationalisation de l’industrie minière. À tout le moins, pour eux, il est urgent de revoir la Loi sur les mines pour mettre fin aux « méthodes issues du Far West » et au « vandalisme corporatif ». Les effets de l’exploitation minière sur la population et sur l’environnement sont dévastateurs et souvent, irréversibles. En bout de ligne, il faut se demander si cela en vaut la peine, lorsqu’on compare les profits versés aux collectivités avec les coûts totaux sur les plans environnemental et humain… La dernière phrase du film fait figure de devise : « Il est à peu près temps d’être maîtres chez nous. »

Le meilleur documentaire franco-ontarien que vous n’avez jamais vu

Il y a environ deux semaines, je faisais une recherche YouTube pour le mot « franco-ontarien », dans l’espoir de trouver un vieux clip de Marie Soleil ou bien encore un vieux sketch de Volt pour mettre sur la page de taGueule en attendant le lancement imminent. Rien d’intéressant sur la première page. Deuxième page presqu’aussi plate à l’horizon.

Quand tout à coup, je tombe sur un titre qui m’intrigue. « J’ai besoin d’un nom (1978) documentaire franco-ontarien ». 6 views. Mis en ligne par « ontarois ». Son seul vidéo. Aucun commentaire. En ligne depuis une semaine.

J’ai vu des vieux documentaires sur le Québec, sur le Canada, sur l’Acadie, sur l’Ontario français, sur CANO, mais celui-ci ne me disait rien. Pourquoi j’en avais jamais entendu parler?

La mythologie franco-ontarienne

La décennie des années ’70 a une place importante dans l’histoire canadienne, québécoise, et franco-ontarienne. C’est là qu’on arrêté d’être canadiens-français, qu’on est devenu autre chose, qu’on a eu un drapeau, et qu’on attendait de voir ce qu’allaient faire nos cousins québécois, sans trop savoir ce que ça voulait dire pour nous. Mes parents, comme ceux de plusieurs gens de mon âge, ont vécu cette époque, mais je n’en connais que quelques anecdotes ici et là; la première Nuit sur l’étang, la création du drapeau franco-ontarien, une soirée passée à écouter tous les albums de Charlebois. En fait, c’était souvent des choses que j’apprenais à l’école et je demandais par la suite à mes parents leur version des faits.

Where have you been my whole life?

Mais là, j’avais devant moi un document d’une authenticité indiscutable (production de l’ONF) et d’une importance capitale. J’étais sérieusement abasourdi, en tant que franco-ontarien, étudiant en communications, et documentaire-ophile, que j’avais jamais entendu parler de ce film.

J’ai regardé le premier 5 minutes, et j’ai compris immédiatement que ce n’était pas le genre de film à regarder de façon distraite en regardant le hockey. J’ai tout de suite fait parvenir le lien à quelques autres collaborateurs de taGueule et j’ai fermé mon ordinateur, avec la ferme intention de m’enfermer dans mon sous-sol pour pouvoir me concentrer sur le film.

What the fuck?

Et j’ai été jeté à terre. Complètement. J’ai été en tabarnak toute la semaine après ça. Complètement outré. Ce film, c’est le genre de film qu’on devrait nous montrer au secondaire. Au Québec, on leur enseigne le Refus global, la Révolution tranquille, Speak White

Me semble que la moindre des choses serait de nous montrer ce film.

En gros, c’est un documentaire sur une réunion de l’ACFO à Sudbury, en 1976. Cette réunion sert de trame de fond au film, qui prend la forme d’un habile montage d’entrevues avec des intervenants parfois pertinents, parfois risibles, toujours percutants. Je veux même pas en dire plus.

Regardez le film. Pour l’amour de tout ce qui est franco-ontarien, regardez ce film. Faites-le circuler, parlez-en, n’importe quoi.

It’s when I remember who I was that I can’t remember who I am

Ce qu’on comprend en regardant ce film, c’est que les déboires actuels de l’Ontario français par rapport à l’assimilation, à la politique, et à la culture elle-même remontent à cette époque. Malgré tous les acquis de la communauté depuis 1978, les questions soulevées par le film sont toujours extrêmement pertinentes, et on n’y a pas encore trouvé de réponse. On a toujours besoin d’un nom.

Pourquoi certains espaces sont-ils moins diversifiés que d’autres?

Ceci est une réponse à l’article Immigration: le Nouveau-Brunswick est-il xénophobe? par David Caron publié le 22 février 2012.


C’est un drôle de titre qu’a choisi de donner David Caron à son article : le Nouveau-Brunswick est-il xénophobe. Drôle, premièrement, parce qu’il annonce qu’il parlera du Nouveau-Brunswick, mais parle essentiellement de l’Acadie, comme s’il s’agissait de la même chose. Deuxièmement, parce qu’à considérer les discours officiels de la province et de l’Acadie via son organe de représentation la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick, on cherche en vain la moindre trace de xénophobie. Qui donc est xénophobe si ce ne sont pas les institutions publiques, les instances de représentation ? On comprend qu’un État puisse avoir des politiques « xénophobe » et on peut attribuer le qualificatif à la population qui les a votées. Il s’en suit généralement un devoir de mémoire. Mais il n’en est rien au Nouveau-Brunswick.

Les discours semblent plutôt faire consensus quant aux bienfaits de l’immigration : on veut que les immigrants viennent. La population de la province décline et vieillie et tous voient, francophones et anglophones, dans l’immigration une bouée de sauvetage, un moyen de garder peut-être pour quelque temps encore la tête hors de l’eau. Xénophobe, donc ? Les élites ne le sont très certainement pas. Est-ce à dire que la xénophobie serait à trouver dans le cœur et l’âme même de tout un chacun ? Et comme il est question d’Acadie dans le texte de Caron, se pourrait-il que l’individu Acadien, par un trait de caractère propre, soit xénophobe, avec preuve à la charge le faible taux d’immigration dans ses villes et villages ?

Une très inégale diversité

On dresse souvent un tableau homogène des communautés francophones hors Québec qui contraste avec le multiculturalisme canadien anglophone – car force est d’admettre au passage que c’est surtout en anglais que se vit le multiculturalisme. C’est un contraste pervers parce qu’il oppose une statistique décontextualisée (un taux d’immigrant de 19 % au pays) à des expériences concrètes et à des chiffres locaux (un taux d’immigrants de 4 % à Moncton). On omet les considérables disparités régionales, la différence entre les milieux urbains et ruraux, anglophones et francophones. Mais des décennies de discours multiculturel promu par le gouvernement ont donné l’impératif noble d’être mondialisés, ouverts sur la différence, quand bien même cette différence ne serait qu’hypothétique, ont donné l’image d’un Canada-mosaïque uniforme d’un océan à l’autre à l’autre.

Trudeau disait du Canada qu’il était le lieu d’un homme nouveau :

« Je crois fermement que les Canadiens sont en train de modeler une société dénuée de tout préjugé et de toute crainte, placée sous le signe de la compréhension et de l’amour, respectueuse de la personne et de la beauté »

Pierre-Elliott Trudeau

En devenant doctrine officielle, le multiculturalisme s’est fait, dans biens des villes et villages, valeur canadienne avant de devenir réalité sociologique et citoyenne. Certaines régions attendent d’ailleurs toujours. Si le NB ne compte que 4 % d’immigrants, contre la moyenne fédérale de 19 %, c’est sans doute, donc, que les habitants de ce coin de pays sont moralement reprochables, empreints encore de préjugés que n’auraient pas les Québécois, les Ontariens, les Britanno-Colombiens, bref les autres Canadiens. Mais ces statistiques canadiennes sont un peu trompeuses. Manifestement notre mosaïque n’est pas tissée du même fil partout.

Montréal, Toronto et Vancouver s’accaparent à elles seules plus des deux tiers des immigrants. Edmonton, Calgary, Victoria, Ottawa, Winnipeg suivent. Pour ne parler que de l’immigration au Québec, la région de Montréal attire trois quarts des nouveaux arrivants et la province s’accapare plus que sa part d’immigrants francophones.

Dès lors qu’on cesse de comparer une province majoritairement rurale ne comprenant que des villes de taille moyenne à une moyenne fédérale, une tout autre perspective se présente. La population combinée des trois principaux centres urbains du NB : Moncton, St-Jean et Fredericton (soit un total de 334 501 habitants) équivalent à trois des dix-neuf arrondissements de Montréal ! Et la province en entier compte moins d’habitants qu’Ottawa !

D’ailleurs, si l’on compare la situation des villes francophones de taille équivalente au pays – elles sont toutes au Québec sauf Sudbury, et j’ajoute St. John’s par souci de comparaison régionale – on se rend rapidement compte qu’elles ne sont pas, elles non plus, des oasis de diversité. En rafale, avec les taux d’immigrants :

  • Moncton – 3,4 %
  • Sudbury – 6,6 %
  • Lévis – 1,5 %
  • Trois-Rivières – 2,2 %
  • Saguenay – 1,1 %
  • Drummondville – 3 %
  • Saint-Jérôme – 2,7
  • Et à Terre-Neuve, St. John’s – 4 %

Ça commence à faire beaucoup de xénophobes, vous ne trouvez pas ?

L’immigration n’est pas qu’une question individuelle

Ceci étant dit, imputer le faible taux d’immigration (on en parle souvent comme si c’était un travers en soi) à l’ouverture de la « population d’accueil » revient à volontariser un peu trop le processus de migration et d’intégration, et à jeter du revers de la main une littérature entière consacrée aux déterminants sociaux et institutionnels de la « rétention ».

J’essayerai de donner deux éléments de réponse pour comprendre sociologiquement la question, d’autres diront le problème, de l’immigration au Nouveau-Brunswick.

Réseaux informels et complétude institutionnelle

Premièrement, les travaux inspirés par l’École de Chicago en sociologie – je pense, au Canada à Raymond Breton – ont démontré que le parcours d’un immigrant est fortement influencé par les ressources financières, politiques et symboliques dont dispose le groupe auquel il appartient et/ou s’identifie. C’est à lui que l’on doit le concept de « complétude institutionnelle » si utile depuis 40 ans pour les minorités francophones. On parvient, grâce à ce concept, à démontrer que les associations, les médias, les réseaux qui se construisent autour de groupes ethniques ou culturels contribuent non seulement à attirer les immigrants – les Haïtiens se dirigent essentiellement à Montréal et à Miami, les Turcs en Allemagne, les Sénégalais en France, les Chinois à Vancouver – mais déterminent en partie le parcours d’intégration des individus – les Juifs hassidiques d’Outremont ou les Acadiens de Moncton étant des exemples de complétude institutionnelle accomplie qui permet de contrer l’assimilation.

Plus un groupe dispose de ressources permettant à l’individu de satisfaire l’ensemble de ses besoins – commerces, emplois, religion, médias, associations –, plus il sera en mesure d’attirer des membres et moins les individus auront tendance à sortir du groupe et à se fondre dans le « melting pot » ; bref, plus y il a complétude institutionnelle, plus il y aura attraction et persistance de la différence. Sans présence institutionnelle il y a assimilation. Et pour un ensemble de raisons, de tels réseaux ethniques et culturels existent principalement dans les grandes villes, dans les centres économiques les plus dynamiques et sont le résultat d’un long processus ou des hasards migratoires (la migration massive qu’a causée la famine en Irlande au XIXe siècle a permis la mise en place relativement rapide de réseaux Irlandais dans plusieurs villes, notamment par le biais de l’Église catholique).

Le défi d’attirer et de retenir des immigrants est donc d’autant plus grand pour ces milieux plus ruraux, plus périphériques, éloignés des grands centres et de la vie économique. Ces lieux ne sont que rarement des points d’entrée, sont le plus souvent des lieux de transit – voir à ce sujet le film de Dufault et Godbout, Pour quelques arpents de neige qui démontre à merveille la logique de l’immigration et de l’intégration dans les années 1960 : les immigrants débarquent à Halifax et prennent le train vers Montréal. Les provinces maritimes ne seront qu’un espace à franchir, et les traces de cette logique se font encore sentir aujourd’hui.
oehttp://www.onf.ca/film/Pour_quelques_arpents_de_neige_/
Les immigrants qui arrivent dans ces lieux périphériques se retrouvent plus isolés, dans une économie moins diversifiée et une population tissée de liens différents, souvent plus intriqués que celle des grandes villes, à plus forte raison quand il s’agit de groupes eux-mêmes minoritaires. Le(s) tampon(s) qui ailleurs amorti(ssent) le choc d’intégration est moins épais, et parfois carrément inexistant. La pression est mise ailleurs, elle prend souvent une tournure plus personnelle.

Or, multiculturalisme officiel oblige, nous devons tous être ouverts, même si l’ouverture ne prend pour nous qu’un sens abstrait, parce que la diversité est absente de notre quotidien. La diversité devient un genre de conte de fées, de mythe où on imagine un peu bêtement que le contact entre Soi et l’Autre devrait se faire sans heurts, dans la bonne entente et l’harmonie parce que nous sommes tous « dénués de tout préjugé et de crainte ». Comme si nous devions toujours déjà être prêts à recevoir des immigrants, un peu comme nous nous attendons à ce que les immigrants nous arrivent déjà intégrés.

Un tel discours, pour vertueux qu’il soit, ressemble drôlement au discours néolibéral utopique d’une humanité réconciliée dans le marché, unie dans la consommation, dont les différences ne sont jamais de fond, mais de style. Et le style, c’est une question de marché. Alors qu’en réalité, il faut du temps, de l’accoutumance. La rencontre de l’Autre n’est pas toujours sans heurts et sans incompréhensions – en bons francophones, notre histoire faite de luttes pour la reconnaissance et l’égalité devrait nous le rappeler !

Devenir la minorité de la minorité sur un territoire contesté

Il y a ensuite le défi supplémentaire que représente l’immigration au sein de communautés linguistiques minoritaires. Quoi qu’en dise le manifeste de taGueule – « nous ne souffrons pas du syndrome minoritaire » – la minorité est un fait sociologique, elle représente un rapport particulier à un territoire, au pouvoir, à la langue, à la sphère publique, aux médias. Si nous pouvons, individuellement, tous être émancipés, il n’empêche que notre existence collective est irrémédiablement celle d’une minorité démographique ; la francophonie canadienne hors Québec ne cessera d’être minoritaire que le jour où elle cessera d’être francophone. Point.

Le défi qui se pose dans un tel contexte, et le NB en est un bon exemple, est le suivant : deux groupes linguistiques luttent pour l’attraction d’immigrants, deux groupes cherchent à mettre sur pied des structures d’accueil – les francophones veulent des immigrants francophones et les anglophones des immigrants anglophones, chacun cherche à attirer les allophones dans son camp et Dieu sait que la compétition est démesurée quand on se bat contre l’anglais – et cette concurrence inévitable fragmente ultimement les réseaux informels si importants pour l’intégration des nouveaux arrivants.

Le cas de Moncton est marquant : l’Université de Moncton, grâce à ses efforts actifs de recrutement, est parmi les plus diversifiées au pays – 15 % de sa population vient de l’international, contre une moyenne fédérale de 8 %. D’ailleurs, la province occupe le second rang en matière d’internationalisation des universités derrière la Colombie-Britannique. C’est donc que des étrangers viennent, mais ne restent pas. N’est-ce pas là la preuve de la « xénophobie » néo-brunswickoise ?

Un début d’explication se trouve peut-être dans le fait que les efforts faits par l’U de M sont contrés, en un sens, par ceux de la Ville de Moncton. L’U de M recrute en Haïti, au Maghreb et en Afrique de l’Ouest, tandis que la Ville de Moncton, elle, recrute essentiellement des immigrants investisseurs en Corée du Sud. L’espace du campus, qui demeure pour les communautés francophones l’un des chefs lieux de la diversité (à Saint-Boniface c’est le quart des étudiants qui viennent de l’international !), est sans rapport avec l’espace de la ville. Les réseaux internationaux qui se tissent d’un côté ne trouvent pas écho de l’autre. Les deux logiques sont concurrentes malgré elles, notamment parce que les francophones et les anglophones ne recrutent pas les mêmes immigrants – il suffit de faire un tour dans les universités des deux langues pour s’en rendre compte – et surtout, ils ne cultivent pas les mêmes attentes. Ils ne peuvent pas cultiver les mêmes attentes. On demande à l’immigrant francophone de participer à la vie de la communauté francophone, mais sa réalité doit transiger avec l’anglais. Cet équilibre constant n’est pas pour tout le monde, et n’est pas une réalité pour les immigrants qui font le choix de l’anglais. Il y a une asymétrie indéniable.

Et puis il y a la tentation du Québec, qui promet un contexte linguistique plus simple, une métropole multiculturelle et un fast track vers la résidence permanente. Le Nouveau-Brunswick, et en particulier l’Acadie, est en manque de moyens face à une telle concurrence.

Être… ici on le peut

Enfin, comme le souligne David Caron, la province se hisse au sommet d’un honteux palmarès, qui n’y est pas pour rien dans la situation et dont les premières victimes ne sont pas que les immigrants. Palmarès qui ne fait que rajouter à l’ironie du slogan de la province, payé au prix effarant de 1 million $  et qui a récemment été retiré, après une brève existence : « Être… ici on le peut ».

Bref, peut-être existe-t-il de la xénophobie dans la province (et j’aurais tendance à croire qu’elle est plutôt linguistique que raciale ou ethnique), mais l’hémorragie démographique à laquelle fait face la province s’expliquerait sans doute mieux par son économie chancelante, par son profond clivage intérieur entre les deux groupes linguistiques officiels, et par l’emprise de la famille Irving sur l’économie et la presse (une situation à peu près unique au sein des pays développés) qui rendent périphérique les débats publics et les choix de société, que par un défaut moral de sa population.

La province fait du sur place depuis trop longtemps, stagne dans ses divisions internes et dans son absence de vie civique significative. À moins qu’une nouvelle conscience citoyenne émerge et puisse se manifester dans des espaces publics ouverts, la province risque d’avoir autant de mal à accueillir des immigrants qu’à retenir sa population.

Mathieu Wade
Acadien, doctorant en sociologie à l’Université du Québec à Montréal


Photo: Pour quelques arpents de neige, ONF, 1962

La francophonie au Maine

Le Franco-américain? Qui est-il? Une espèce en voie de disparition dites-vous? Pourtant, il mérite tout de même qu’on s’intéresse à lui. Au 19e siècle et au début du 20e siècle, nombreux ont été ceux qui ont quitté le Québec (et par extension l’Acadie) pour la Nouvelle-Angleterre pour travailler dans les usines de textiles, notamment. En fait, de nos jours, il semblerait que près de la moitié de la population de cette région des États-Unis auraient des racines canadiennes-françaises quelconques.

Au Maine, près d’un tiers de la population déclare avoir des racines francophones et près de 7% de la population, surtout concentrée dans trois régions : le nord, le centre et le sud, parlent toujours le français à domicile. De son côté, le comté d’Aroostook compte même plusieurs communautés majoritairement francophones. Fait intéressant, car en 2014, le comté sera l’un des trois hôtes du prochain Congrès mondial acadien qui se tiendra également dans le Madawaska (Nouveau-Brunswick) et le Témiscouata (Québec).

Jason Parent est un fier francophone de cette région. Il est également président du comité organisateur du

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Maine pour cet événement. J’ai profité de cette occasion pour en savoir davantage sur cette communauté francophone méconnue. Quoique parfaitement bilingue, l’entretien suivant est en anglais pour la simple raison que M. Parent affirme avoir plus de facilité à s’exprimer en anglais à l’écrit (l’entretien a eu lieu par courriel).


Briefly, could you paint me a portrait of the present situation of the francophone population in Aroostook County (and the state of Maine).

Maine has the second highest percentage of French Americans in the U.S. Only New Hampshire has a higher percentage of French Americans. In Aroostook County (particularly the St. John Valley region of Aroostook County) many Acadians still speak French at home. See the percentage of French speaking people as cited below in some of the larger communities in the St. John Valley:

Madawaska, Maine (pop. 4,534) – 84% French-speaking

Fort Kent, Maine (pop. 4,233) – 61% French-speaking

Van Buren, Maine (pop. 2,631) – 79% French-speaking

Frenchville, Maine (pop. 1,225) – 80% French-speaking

Eagle Lake, Maine (pop. 815) – 50% French-speaking

St. Agatha, Maine (pop. 802) – 80% French-speaking

St. Francis, Maine (pop. 577) – 61% French-speaking

Grand Isle, Maine (pop. 518) – 76% French-speaking

Saint John Plantation, Maine (pop. 282) – 60% French-speaking

Hamlin, Maine (pop. 257) – 57% French-speaking

The French that is spoken in many of the homes in the St. John Valley is an old world French that is most often mixed with English in the same sentence. For example it would be uncommon for someone in the Valley to refer to a computer by its French term ordinateur – rather the person speaking would likely say the word computer in the middle of an otherwise French sentence.

How has the situation evolved over the years?

The history of a supportive climate for speaking French in Maine has swung from extreme to extreme over the generations and has somewhat settled in a lukewarm place. In the early part of the last century, Maine had the highest percentage of people registered as members of the Klu Klux Klan in the United States. Unlike in the south where the KKK was forwarding an anti-African American agenda, in Maine the KKK was positioned against the French and Catholics. In the middle part of the last century laws were passed by the state prohibiting the speaking of French in schools. If mobile casino French was heard on the playground, students in my parent »s generation were punished for speaking the language and required to write repeatedly on the chalkboard « I will not speak French at school. »

In the 1990″s a revival of sorts happened as a successful grant was written to the Federal Government Department of Education to introduce a new French Immersion Program into schools in the St. John Valley. The immediate results were mixed as not all school districts in the Valley signed on with the project. The schools (particularly those in the western part of the Valley) that didn »t take advantage of the program didn »t do so largely because the damage had already been done by nearly a century of discrimination of the French people. For some, the French Heritage was not something you ran up the flagpole – rather many families chose to hide their ancestry by anglicizing their last name. For example some Roys became Kings, Levesques became Bishops, LeBlancs became Whites, etc. Unfortunately, funding for the project ran out within the last decade. Without funding, the French immersion project is far less effective and has all but disappeared in some of the schools.

Are the younger generations still speaking it?

There is a bubble of youth in the communities that engaged in the French Immersion Program that do speak French quite well. Otherwise, you do hear French spoken by the younger generation on occasion. Much like their parents and grandparents, the French is a unique Valley Franglais.

Do they still have close connections to their heritage?

The coming of the World Acadian Congress has provided a resurgence of sorts for the Acadian Heritage in northern Maine. The youth have a very keen understanding of what it means to be Acadian. They don »t feel that speaking French is a litmus test for being Acadian. They understand that geopolitical decisions, made long before they were even imagined, have dictated the current situation with the erosion of the French language in our region.

Are the older generations still passing it down?

Yes, especially the grandparents. What is particularly heartwarming is that they are passing down the unique local French spoken here to their grandchildren. The youth hear the difference from the more formal French they are learning in school. It sparks an interesting dual learning opportunity and cross cultural experience of sorts.

How often could a visitor hear the french language in public spaces?

Everyday and at all times. It is very dominant in the St. John Valley. What one should expect to hear is that Franglais I noted — a unique blend of French and English that is seamless within the same sentence and seemingly understood by all.

Theoretically, would it be possible to live only in french in certain communities?

Yes. Some more elderly members of the community do live and speak only in French. Government and social agencies have hired personnel accordingly to interface with such citizens in the St. John Valley.

Do you believe that the World Acadian Congress will help advance the situation?

Most certainly. I have always been a believer that economic incentives are the only true motivational force. The St. John Valley has never in my lifetime had such a tremendous opportunity to realize such tremendous economic windfall on the basis of our culture and language. I spoke only French at home before I was enrolled in grade school. From that point forward English became my dominant language because the world around me dictated it be.

From my perspective, cultural and linguistic enlightenment, much like enlightenment on issues pertaining to conservation and the environment, are only realized altruistically by a few « die hards » who really believe in the cause above all else. For the rest, it is not truly embraced until it makes sense to their pocketbook or will benefit their immediate situation. When Maine added a return deposit for beverage containers, nearly the entire population separated its bottles and cans and now bring them religiously to their local redemption center. Had that not been instituted you can bet that the percentage of those recycling would be negligible today. I believe the Congres Mondial Acadien will be the bottle deposit bill for the Acadian Culture and French Language in our region. Like the bottles and cans, our culture its about to find its way to redemption!

What are some of your hopes?

My greatest hope is that we not only save and bolster our French – but renew a pride and confidence in our Brand of French. That we take this opportunity when the Acadian and French World comes to our doorstep to understand and demonstrate that we are just as good as our fellow French speakers around the world. I also hope that our participation as one of the three regions in the International territory of Acadian of the Lands and Forests brings light to the fact that not speaking French is not a disqualifier to being Acadian. There are some people that live in the Valley and other Acadians in Maine and around the United States that don »t speak

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French largely because of the hand that history has dealt them. In all that we do to bring the Acadian Congress to our region, we want for our event in 2014 to say to the World that you are not ex-communicated from the family if you don »t speak French. Our history with the dominant English speaking population in Maine and the efforts to strip us of our pride as citizens of our own state and country because we were different dictates that we understand and have learned that the stick approach is wrong and the carrot approach is much more effective.

And finally, why should one be interested in learning about the history of the francophone population in Aroostook county?

Fundamentally because it is so unique. It is a story defined by triumph over repeated tragedy. The mere fact that we exist as we do today is testament to the spirit of our people. The history of the Acadians in Maine »s St. John Valley is marked with one upheaval after another. From the deportation from Acadie and subsequent migrant people that again lost their homes in present day Fredericton to the separating of families and a people into two different countries after the Bloodless Aroostook War to the hostilities afforded French speakers in Maine in the last century – it is amazing that we are here to tell the story. Moreover, it is exciting that the center of the Acadian universe will be here in just two short years!


Lecture recommandée

Voyages: A Maine Franco-American Reader


Photo: Souper à la résidence de Monsieur J.H. Dubé, fermier de patates, Wallagrass, Maine.
Photographe: Jack Delano, Octobre 1940, National Library of Congress

L’ennemi parmi nous

On a beau critiquer les actions originaires de la communauté anglophone de l’Ontario, mais ce serait oublier un grand problème existant chez les jeunes Franco-Ontariens. Si ce n’est pas la réalité de toute la province, ce l’est au moins dans la région de Toronto, où cohabitent deux conseils scolaires de langue française. De l’extérieur, ces bâtisses représentent tous les exploits et les sacrifices des Canadiens français s’étant battus pour leurs droits, des Patriotes à nos jours. On s’attend alors à y retrouver des jeunes fiers de leur langue, de leur culture et de leur héritage. Malheureusement, on sait bien que les apparences sont très souvent trompeuses, comme dans ce cas. En y posant pied, on n’entend pas un seul mot de français de la part des élèves. En effet, c’est l’anglais, et même parfois l’arabe, qui y est la langue d’usage. James Whitney, le Premier Ministre de l’Ontario qui a fait passer le célèbre Règlement 17, en serait très fier.

Il est vrai qu’autrefois l’ennemi du Canadien français était l’Orangiste, mais de nos jours, il est son propre ennemi. Pourrait-on vraiment dire que tous les élèves de ces écoles dites francophones sont des Franco-Ontariens? Aucunement. Ce serait une terrible insulte envers tous ceux et celles qui ont tant fait pour les droits des Canadiens français, mais surtout des Franco-Ontariens. Tandis que certains renient leur héritage francophone, d’autres le dissimulent. Ce n’est qu’une petite minorité qui s’affirme et se dit fière. Évidemment, ce n’est pas facile pour eux, se retrouvant comme victimes dans l’institution qui se devait de les protéger. Ils se font ouvertement appelés « fags » et on les critique pour leur choix linguistique pas « cool », mais qui est, après tout, le leur.

Si un étudiant francophone voulant s’exprimer dans la langue de ses aïeuls dans une école francophone se fait demander : « Why are you speaking french? », alors comment peut-on espérer une solidarité franco-ontarienne? Si un étudiant demandant à son enseignant d’éducation physique s’il peut regarder une vidéo d’exercices en français se retrouve sur le banc dans ses équipes sportives, comment peut-on croire que ces écoles promeuvent vraiment notre culture et notre langue? Si un enseignant crie après une élève de neuvième année ayant demandé de regarder une vidéo en français et qu’elle en pleure, peut-on espérer un meilleur avenir pour notre minorité? Si, dans une école, un élève ne peut être lui-même sans être persécuté, arrêtons de dire que tout va bien et cherchons des solutions.


Photo : Archives de la ville de Toronto