Aux casseroles, camarades!

Chers camarades,

Je ne puis qu’admirer et envier ces jeunes gens qui se mobilisent pour avoir ce que nous voulons tous: une société plus juste, plus ouverte, plus transparente. Je ne puis qu’admirer ces jeunes gens qui osent dénoncer, qui veulent rompre avec un passé odieux, et qui refusent de se résigner devant ces dirigeants fossilisés. J’admire aussi le courage dont ils font preuve en manifestant leur déception, leur colère et leur indignation.

Ces jeunes gens rêvent de voir ce petit groupe éhonté s’incliner et succomber enfin, de voir leur petit pouvoir feutré et confortable s’écrouler, eux pour qui la corruption, la collusion, le patronage et le mépris semble être monnaie courante. Et ce mépris, il est sans bornes; il a même atteint des sommets inégalés. Ils ont perdu leur autorité morale avec leurs demi-vérités et leurs mensonges. Eux qui pratiquent l’obscurantisme, qui se rencontrent dans leur bunker à béton, en conciles secrets, eux qui, comme des Grands Prêtres, professent connaitre et détenir la Vérité venue directement des Oracles. Eux qui sacrifient la jeunesse sur l’autel sacré du peuple au nom de cette Vérité nébuleuse et obscure. Eux qui se pavanent dédaigneusement et se galvaudent avec leurs airs arrogants, avec leur suffisance, leurs injures, leur grossièreté, leur effronterie, leur orgueil et leur mépris à outrance. Eux qui, aveuglés par leur petit pouvoir paroissial, ne répondent plus aux besoins et aux désirs de ceux qu’ils prétendent représenter et desservir, et qui n’ont que leurs propres intérêts à cœur. Eux qui perpétuent et font même l’éloge de la médiocrité. Les ineptes et les abrutis dans cette confrérie du médiocre, du parvenu et de la mièvrerie, du cercle infâme, vil et ignominieux des intimes et de la congrégation des Grand Prêtres dans le secret des Dieux, démontrent avec brio leur ignorance, leur bêtise et leur mépris. Ces mégalomanes paranoïaques et hystériques, qui punissent injustement ceux qui osent les contredire ou les critiquer, et qui cherchent des boucs émissaires à sacrifier pour excuser leurs propres bévues, offenses et pêchés, ne font que détériorer une situation déjà malsaine, putride, corrompue et pourrie.

À ceux qui ne servent qu’à leurs propres intérêts, rendons-leur la monnaie de leur pièce avec notre mépris, notre dédain et notre honte. Ils ne méritent pas mieux. Il est vrai que nous devrions avoir du respect pour nos ainés, à condition bien sûr qu’ils méritent ce respect. C’est à nous de juger maintenant s’ils méritent encore notre confiance et notre respect, si effrités soient-ils. Car, il est des temps dans l’Histoire où la jeunesse révoltée sait, et la vieillesse corrompue ne peut plus.

Contrairement à ma génération qui a donné son consentement tacite au statut quo et qui est restée muette et bâillonnée, trop timide et timorée devant l’immuabilité du pouvoir qui se baignait jusqu’alors dans sa propre turpitude, qui a baissé les yeux et qui a baissé les bras et qui a baisé le cul de la caste des roitelets, des autocrates et des oligarques, contrairement à ma génération qui n’a pas eu le courage de ses convictions, qui avaient peur des réprimandes et des représailles, qui a consentie, qui s’est souscrite, qui a acquiescé, et qui a permis à ces abus de se perpétrer et de se perpétuer, contrairement à ma génération, dis-je, ces jeunes gens ont le courage de donner voix à leur exaspération, à leur frustration et à leur rage. Nous devrions les appuyer, ces plus jeunes que nous, ces plus courageux et intrépides que nous, ces plus vaillants et plus téméraires que nous, qui veulent nous insuffler d’un vent de renouveau et qui nous inspirent, j’espère, nous implorent même, à ne pas devenir les fossiles de demain. J’espère que notre génération sera la dernière dans la lignée des agneaux sacrifiés, des moutons écervelés, attardés, passifs et passéistes, et que nous choisiront dorénavant d’élever nos enfants pour qu’ils deviennent lions.

Chers camarades, rappelons-nous que le contraire de la vérité n’est pas le mensonge; c’est le silence. Comme le disait si bien mon ami Olivier Kemeid, «Pourquoi nous sommes-nous tus si longtemps devant leur logorrhée immonde?» Et rappelons-nous enfin, chers camarades, «Qui ne dit mot, consent.»

Aux casseroles, camarades!

Casseroles Night in Canada

C’est ce soir la soirée de solidarité canadienne, la Casseroles Night in Canada, en appui à la grève étudiante au Québec. Cliquez ici pour voir s’il y a des manifs qui s’organisent près de chez vous.

Sortez avec vos casseroles dès 20h et faites du bruit!


Image : Keep Calm and Bang On, Juan Madrigal Photo

Printemps érable 101

Cela fait déjà quelques mois que taGueule est en ligne. Cela fait un certain temps qu’on réfléchit à notre société sur plusieurs niveaux. On critique et on applaudit les institutions, les artistes, les politiciens, le organismes, etc. aux niveaux local, provincial et fédéral, toujours (dans la mesure du possible) en tentant de faire des liens avec l’Ontario français.

Également, vous avez sans doute remarqué que notre rythme de production a ralenti. On prend plus de temps à travailler nos idées, à réfléchir (pour ne pas gueuler dans le vide) et à peaufiner nos textes. On commence à comprendre les rouages de notre nouvelle bebelle, puis jusqu’à présent, ça roule en titi.

En même temps, si notre rythme de production a ralenti, c’est qu’on s’est branché sur le conflit social qui se passe au Québec depuis le mois de février. En créant taGueule, un des objectifs qu’on voulait atteindre était de ne jamais sombrer dans le nombrilisme. C’est à dire, s’il y’avait un évenement important qui se passait dans le monde qui n’était pas une question profondément franco-ontarienne, on voulait en parler malgré tout. De toute façon, une grande partie de nos collaborateurs sont étudiants, professeurs ou de jeunes professionnels récemment diplômés. Cette crise sociale (qui a vu ses débuts en tant que crise étudiante) nous intéresse. Impossible pour nous de continuer à se mettre le doigt dans ce qui semble être des petits paper-cuts franco-ontariens lorsqu’on les compare aux hémorragies de problèmes de nos voisins. Non seulement qu’une grande partie de ce que réclament les Québécois en ce moment s’applique également aux Franco-ontariens, mais elle s’applique aussi au monde occidental en général.

Depuis l’adoption de la loi 78 par l’Assemblée nationale du Québec le 18 mai, les manifestations quotidiennes se terminent de façon de plus en plus brutale. Les arrestations de masse, les plaintes d’agression sexuelle, des coups de matraque aux journalistes, la poivre de cayenne en pleine face, de la casse par des agitateurs (qui ne représentent pas la grande majorité des manifestants) mais et aussi par la police sont devenus des activités quotidiennes. Ce conflit n’est plus qu’une question étudiante, ce n’est plus qu’une question de droits de scolarité. Au contraire, c’est une question sociale, une critique d’une société néolibérale corrompue dans son ensemble.

Je pourrais m’étendre davantage sur le sujet, mais ceux que je voudrais convaincre me prendraient pour un petit socialiste de la go-gauche, et ceux qui m’écouteraient ont déjà entendu cette histoire. Ce que je voudrais faire au lieu, c’est de vous offrir un guide; une marche à suivre qui servirait à comprendre ce qui se passe au Québec (et qui commence à s’étendre partout au Canada). Les sources que je vous offre sont nécessairement subjectives (comme n’importe quelle source que vous lirez à n’importe quel sujet). Cela dit, elles vous offrent une vitrine sur ce qui se passe réellement en ce moment, chose que les médias traditionnels ont malheureusement très peu faite. À mon avis, cela vous permettra de formuler votre propre opinion en utilisant votre pensée critique.

Le petit guide du printemps érable 101

Par où commencer?

Twitter

Twitter. Vous savez, le médium de communication archaïque, à 140 caractères? Celui que vous n’avez jamais pris la peine de maîtriser? Eh bien oui, une grande partie de l’information relayée au sujet du conflit est transmise par Twitter en raison de sa simplicité. C’est que même sans un téléphone intelligent, Twitter vous permet de faire des mises à jour et à vous informer sur ce qui se passe autour du monde, instantanément. Je vous offre un guide complet sur l’utilisation de Twitter, ainsi qu’un guide de recherche pour suivre le conflit.

1) Suivez des utilisateurs intéressants et engagés. En voici quelques-uns: @GNadeauDubois (porte-parole de la CLASSE), @ASSEsolidarite (twitter officiel de la CLASSE), @ThomasGerbet (journaliste de Radio-Canada qui tweet souvent en direct des manifs avec des photos), @JoseeLegault (chroniqueuse politique au voir.ca), @SPVM (service de police de la ville de Montréal), @FEUQ (Fédération étudiante universitaire du Québec), @FECQ (Fédération étudiante collégiale du Québec).

2) Faites des recherches dans Twitter pour les #hashtags: #manifencours (pour les manifestations en cours), #casserolesencours (pour les casseroles en cours à partir de 20h à chaque soir), #ggi (acronyme pour la «Grève générale illimitée» qui a lieu en ce moment), #loi78 (pour suivre ce qui se passe par rapport à la loi et ses répercussions), #PrintempsErable (un joli jeu de mots sur le «printemps arabe» de 2011), #MapleSpread (to spread the Maple to our anglophone friends in the rest of Canada).

Livestream

CUTV (Concordia University TV) couvre les manifestations de Montréal en direct depuis le début. Étant la presse étudiante de l’Université Concordia, ils se font souvent prendre pour des manifestants (et traités ainsi; heureusement sur caméra). Ce qui est génial, c’est qu’on voit le conflit se dérouler devant nos yeux, en direct. Même si on ignore le journalisme qui est parfois médiocre et tout sauf neutre (être en ondes toute une soirée de temps, souvent de 14 h à 1 h du matin, et ce, depuis le début du conflit, c’est taxant), on voit immédiatement que ce conflit transcende la question des frais. Dès que le soleil tombe, les manifestants pacifiques font face à la police, souvent de façon assez brusque.

Pour écouter les manifestations en direct, vous n’avez qu’à cliquer sur l’écran en haut à gauche de cette page.

YouTube

Ici, vous pourrez vous rattraper sur tout ce que vous avez manqué. Je vous suggère quelques clips qui vous permettront de voir des exemples des abus dont je parlais tantôt. Bien que la plupart de ces clips semblent pencher du côté des manifestants, il faut se poser les questions suivantes:

Est-ce que parler à un policier mérite qu’on se fasse poivrer? Je croyais qu’il était dangereux de se servir de poivre de cayenne de façon aussi grossière

Est-ce que de barrer la route à un policier souhaitant décoller en voiture mérite qu’on se fasse lutter?

Est-ce que le fait de se faire lancer une chaise à partir d’une terrasse justifie le fait de lancer des gaz lacrymogènes à tous les clients qui s’y trouvent ET de leur relancer la chaise?

Qu’est-ce qui justifie le fait de donner de coups de matraque à des gens déjà par terre ou à une foule qui se disperse déjà?

En tout cas, si ce que vous aurez appris sur ces méthodes n’est pas assez pour vous convaincre qu’il y a quelque chose de profondément mal avec ce conflit, dites-vous qu’en Ontario, on paie déjà le double, voire le triple de ce que paient les étudiants qui ont déclenché cette crise. Dites-vous que selon les normes provinciales, les frais des étudiants augmenteront jusqu’à 5% l’an prochain. Dans une institution ontarienne relativement peu dispendieuse comme l’Université Laurentienne (±5900$ par année en 2011-2012) cela équivaut à environ 270$. On n’est franchement pas loin l’augmentation annuelle de 325$ à laquelle faisaient face les étudiants québécois n’est-ce pas? Je ne demande pas pourquoi les étudiants de l’Ontario n’ont pas encore agi de façon importante. Le discours des différences culturelles, budgétaires, etc., je l’ai déjà entendu. Ce que je me pose comme question, c’est plutôt pourquoi, même si l’accessibilité à l’éducation en Ontario est en pire état qu’au Québec, on se contente de ces réponses au lieu d’agir? Les Québécois ont entendu une grande partie de ces réponses-là aussi, ça ne les a pas empêchés, eux.

Si vous habitez la région de Sudbury, je vous invite à une première manifestation le 1er juin à 16 h, non seulement pour démontrer notre solidarité envers les étudiants québécois, mais également pour montrer à nos politiciens qu’on peut se mobiliser, que le même genre de conflit arrivera sous peu en Ontario s’ils n’agissent pas. Si non, je vous invite à vous informer sur ce qui se passe dans votre région et de commenter ci-bas. Si vous ne trouvez rien, c’est peut-être que vous êtes celui qui doit amorcer ce réveil de conscience…


Illustration : Mimi