Joyeux anniversaire mon bébé!

Il y a 53 ans aujourd’hui, je tenais dans mes bras le plus joli poupon que le pays n’avait jamais vu. Ce que j’étais fière! Tu étais tout rose et rondelet. Je t’appelais tendrement mon porcelet.  J’ai remarqué d’ailleurs en regardant les nouvelles que tu es presque aussi potelé qu’à l’époque.  Un signe sans doute que tu es né dans un pays prospère et que tu n’as jamais manqué de rien. J’aimerais avoir la certitude que c’est ce qui s’annonce pour notre avenir, n’est-ce pas chéri?

Qui aurait cru que mon petit cochon rose deviendrait l’un des grands décideurs de ce monde? Quand je pense qu’on parle de toi partout dans le monde parce que tu t’es retiré du protocole de Kyoto et que tu songes à militariser l’Arctique, ça me donne le goût de pleurer.

Même si je ne suis pas toujours d’accord avec tes décisions, rappelle-toi mon p’tit cœur en chocolat que je t’aimerai toujours.

J’allais presque oublier! Tu as deux anniversaires à célébrer cette semaine.  Un an déjà pour certains et une dure année pour d’autres, n’est-ce pas? Vous faites la fête à Ottawa tes amis et toi depuis un an.  Vous allez célébrer votre anniversaire?  Pas moi. Comme je te l’ai souvent répété,  tes amis ont une mauvaise influence sur toi. Si tu ne reçois pas de cadeaux cette année, ce sera leur faute. Je n’en ai pas les moyens. À mon âge, on ne peut plus faire des folies, tu m’en excuseras.

Je te souhaite le plus beau des anniversaires mon porcinet!

xxx

Maman

Trop, c’est comme pas assez

Je suis une hybride, une métisse à la peau blanche.

Je suis, pour paraphraser une chanson de Jean Leloup, une fille d’Ottawa, grandi à Ste-Catherine, d’une mère franco-ontarienne et d’un père du bas de Lachine.

Trop québécoise pour les Canadians, trop ontarienne pour les Québécois, je suis entre deux chaises. Parfaitement bilingue, j’ai appris à parler l’anglais quand j’ai commencé à parler. Je suis donc trop anglaise pour les français, et trop française pour les anglais. Pas assez ontaroise, pas assez québécoise.

Je ne suis pas une vraie Québécoise selon les uns, je ne suis pas une vraie Canadienne selon les autres. Je suis une expatriée dans mon propre pays. Pourtant, sur papier, je suis la Canadienne modèle. Je suis le wet dream de Pierre Elliott Trudeau.

J’ai lu quelque part qu’on ne pouvait pas ne pas être indépendantiste si on connaissait bien son Histoire. Eh bien! Je connais mon Histoire sur le bout des doigts. Et parce que je connais mon Histoire, je ne suis pas souverainiste, ne le serai jamais. Être souverainiste, ce serait renier le pays de mes ancêtres, eux qui l’ont bâti, l’ont porté à bout de bras et me l’ont légué. Ce serait trahir leur mémoire. Être souverainiste, ce serait pour moi la même chose que déshériter mes enfants, les priver de leur bien le plus précieux. Ce serait écraser leur avenir. Être souverainiste, ce serait aussi renier une partie de moi-même, de mon identité.

Je crois au Canada, même si je ne crois pas au Canada ultra-militariste et born again de Stephen Harper. Les premiers ministres, les gouvernements, sont toujours remplacés, un jour ou l’autre. En attendant ce jour, je continue à bâtir ce pays, pour le léguer à mon tour à mes enfants.

N’en déplaise à ceux qui trouvent que je suis trop ceci, ou pas assez cela, je ne suis pas une french frog. Je ne suis pas une dead duck. Je ne suis pas une vendue, ni une colonisée. Je suis canadienne-française, et je le dis avec fierté.

Leçon de mathématiques

Dans cette chronique Lettres à mon fils premier ministre, j’écris à Stephen Harper comme si j’étais sa mère et comme s’il avait 7 ans.


Mon cher fils,

Pardonne-moi d’avoir négligé nos correspondances au cours des dernières semaines. Mais voilà que je m’inquiète pour toi parce qu’à ton tour, tu négliges ton peuple. Tu es pire qu’un bébé! Si maman n’est pas là pour te surveiller, tu fais du dégât autour de toi comme ce n’est pas possible. Heureusement que mon amour pour toi est tout puissant et qu’il viendra à bout de te sauver, mon fils adoré.

Mon chéri, ton père et moi avons tout donné pour tes études en économie. Mais ton comportement des derniers jours nous donne l’impression que tu n’as rien appris. Tu devras d’ailleurs m’expliquer la logique derrière tes opérations parce que je n’y comprends rien.

Je crois qu’il serait bon de te rafraîchir la mémoire en faisant un peu de mathématiques. Tu dois apprendre à appliquer quelques méthodes de calcul toutes simples. Je t’ai préparé une résolution de problème, faisons-le ensemble.


Jean reçoit 100 $ par semaine. Comme tout bon citoyen, il remet 30 $ en impôts chaque semaine au gouvernement.

Combien lui reste-t-il?

Il lui reste 70 $ (Opération simple, n’est-ce pas mon poussin?)

Avec cet argent, Jean consomme des biens taxables. En tout, 5 % de cette somme, c’est-à-dire 3,33 $, retourne dans les coffres du gouvernement fédéral.

Combien Jean remet-il d’argent au gouvernement chaque semaine?

Il en remet 33,33 $

Imagine maintenant que Jean perd son emploi et qu’il n’est plus en mesure de consommer autant de produits taxables, combien d’argent se retrouvera dans les coffres du gouvernement?

Pas mal moins.

Finalement, si 20 000 personnes comme Jean perdent leur emploi. Combien d’argent reviendra dans les coffres du gouvernement?


Faisons le calcul ensemble :

20 000 emplois
X
(pas mal moins d’argent)
_______________________

Pas grand-chose!


Tu vois mon trésor, le calcul et la logique sont simples. Je m’attends donc à ce que tu corriges la situation rapidement. Je n’ai pas besoin de t’expliquer que les gens qui perdent leur emploi sont souvent malheureux et n’ont pas le cœur à la fête. Et, dois-je te rappeler que les familles qui n’ont pas d’argent, ne peuvent pas acheter de cadeaux à leurs enfants. Les petits garçons comme toi ne recevront peut-être pas les jolis avions qu’ils ont demandés.

Maman t’aime mon lapinot et je veux être fière de toi.

Fais bien tes devoirs ma petite truffe en chocolat.  J’ai bien hâte de te croquer un bécot.

xxx

Maman

Tu ne voleras point

Mon ti-loup,

Je prends une fois de plus le temps de t’écrire parce que je n’aime pas parler à une machine pour laisser des messages.  Il faut que je te dise absolument que je ne suis pas très fière de ce vous faites toi et ta bande.

Veux-tu bien m’expliquer c’est quoi ces histoires de robots qui appellent du monde pour leur raconter des mensonges? Premièrement, un robot, ça ne parle pas et si ça parle, ça ne raconte pas de menteries.  Maman ne pensait jamais que tu ferais quelque chose comme ça mon trésor.  Tu sais pourtant que c’est contre nos valeurs de raconter des mensonges, on te l’a répété souvent. Et ne me dis pas que ce n’est pas toi, je te connais trop bien.  N’oublie pas, une maman sait tout! Tu dois cesser de jeter la faute sur les autres mon bébé. Tu es un grand garçon maintenant et tu dois prendre tes responsabilités!

Quand t’étais petit, ton entraîneur au hockey avait dit aux joueurs de l’équipe des rouges que la partie aurait lieu dans un aréna à l’autre bout de la ville. Tu te souviens? Comment oublier une telle humiliation! Vous aviez gagné par défaut ce soir-là. Que Dieu vous bénisse! J’étais tellement gênée que mon p’tit poussin soit associé à une telle ignominie. Papa disait que vous l’aviez volée celle-là.  Il n’avait pas tort pour une fois. On te l’a répété souvent mon chéri : « Tu ne voleras point ». Tu sais très bien de quoi je parle.

Ce qui m’inquiète le plus, c’est que tu commences à te comporter comme l’espèce de cowboy du Texas qui a des petits yeux rapprochés. Tu sais, ses parents n’ont jamais vraiment eu confiance en lui. Mais moi je t’aime mon ti-pou et je serai toujours là pour toi.

Prends soin de toi mon poussinot.

Xxx

Maman

Big Mother is watching you

Mon cher fils,

Il y a longtemps que je n’ai pas pris le temps d’avoir une bonne discussion avec toi. Je sais que tu es bien occupé ces jours-ci, mais j’ose croire que tu as quelques minutes pour lire ces petits mots tendres.

Je veux te parler de la vie privée. En voyant tes amis faire des scandales cette semaine, je me suis souvenue de la fois où j’ai trouvé des photos, que d’aucuns qualifieraient d’inappropriées, dans tes tiroirs. Tu te souviens? Tu m’as fait une crise! « Maman, tu t’es immiscée dans ma vie privée! » et tu m’avais ensuite accusée délibérément d’espionnage, alors que je ne faisais que ranger tes sous-vêtements dans le premier tiroir de ta commode. J’en ris encore. Tu m’appelais « Big Mother »! À partir de ce jour, j’ai été plus prudente et j’ai respecté ta requête. J’ai fait ça par amour et par respect pour toi mon chéri.

Est-ce que tu te rappelles du jour où tu es entré dans ma chambre sans frapper te demandant d’où provenait le bruit étrange que tu entendais? Papa et moi t’avions vivement sermonné sur le respect de l’intimité d’autrui. Il me semblait, à l’époque, que tu avais bien compris le message. À ton tour, tu as respecté notre intimité.

Ce qui me tracasse mon poussin, c’est que j’ai l’impression que tu subis les mauvaises influences de tes amis. Particulièrement le petit moustachu qui veut surveiller tout l’Internet. En plus, il utilise des gros mots pour qualifier tous ceux qui ne pensent pas comme lui. Je me demande bien comment il a été élevé. Entre nous, penses-tu vraiment qu’il fait ça pour l’amour des enfants? J’en doute. Tu pourras lui dire que, comme la plupart des gens, nous ne sommes pas des criminels. Comme ça, j’espère qu’il nous laissera tranquilles. Maman fait ça pour te protéger mon chéri. Une maman reste toujours une maman, même quand son petit loup est devenu grand.

Je sais que ton temps est précieux mon coquelicot, j’attends de tes nouvelles bientôt.

Bisous

xox

Maman

P.s. Vous étiez mignons comme tout avec les pandas!

Première correspondance : Attawapiskat et le respect

Dans cette chronique Lettres à mon fils, j’écris à Stephen Harper comme si j’étais sa mère et comme s’il avait 7 ans. Cette première correspondance a originalement été publié en décembre 2011.


Mon cher fils,

Je crois que nous devons prendre un petit moment pour discuter. J’observe ton travail ces derniers temps et j’ai l’impression que je n’ai peut-être pas réussi à te transmettre les valeurs auxquelles je tenais. Tu as fait de bien mauvais choix et le moment est venu pour moi de te rappeler quelques règles de savoir-vivre et de bienséance.

J’ai été très déçue, cette semaine, quand tu as choisi de ne pas venir en aide à tes cousins d’Attawapiskat.  Tu as de l’argent et tu as les moyens de les aider! Tes cousins du Grand Nord se contentent de bien peu pour vivre et toi, tu oses dire qu’ils profitent de ton argent!  C’est vrai que tu leur en as donné beaucoup, mais c’était insuffisant pour qu’ils puissent s’en sortir. N’oublie pas qu’ils n’ont pas la chance de vivre dans une aussi grande maison que la tienne. Dois-je d’ailleurs te rappeler que nous payons cher pour te permettre de vivre dans cette très grande maison.

Mon amour, je t’ai souvent expliqué que c’était important d’aider les autres, même ceux que tu ne respectes pas.  Maman croit que tu dois laisser tomber tes préjugés.  Souviens-toi ce que je t’ai souvent dit, nous sommes tous des êtres humains et nous nous devons un respect mutuel.

Pour t’aider à comprendre, je vais te donner un exemple.  Disons que Grand-Maman Élisabeth trouve que tu dépenses trop d’argent en jouets de guerre et qu’elle décide de contrôler elle-même ton argent. Comment réagirais-tu?  Est-ce que tu comprends mieux maintenant ce que tu fais à tes cousins du Grand Nord?

Mon chéri, tu aimes bien pouvoir faire ce que tu veux avec ce qu’on te donne. Je suis convaincue que tes cousins d’Attawapiskat aimeraient être aussi chanceux que toi.

Tu me déçois Stephen. N’oublie pas que tu dois respecter la main qui te nourrit.  Ton père et moi te donnons beaucoup et, en échange, on s’attend à ce que tu sois raisonnable et que tu partages.  Tes cousins du Grand Nord ont besoin d’aide maintenant.  Je t’en prie, mon ti-loup, rends-moi fière de toi!

Bonne semaine mon poussin.

xox

Maman