Tricia Foster : Marginale et triomphante

Ses fans habitués risquent d’être un peu déstabilisés. Tant mieux.

Négligée, le nouvel album de Tricia Foster, s’installe confortablement dans la marge de ce qui se fait habituellement en musique francophone au Canada. Une bouffée d’air frais.

Plongeant entre le trip-hop (Pendule), le drum & bass (M. Le Temps) et le jazz atmosphérique (Leaves), la grande fille avec une grande gueule née dans un trailer park près de North Bay dans le Nord de l’Ontario nous livre un album sombre, saupoudré de fébrilité et minimaliste à nous faire ronger les doigts. Gros phat beat qui fade out pendant une montée fulgurante de cor français. La négligée sait séduire.

Avec Olivier Fairfield (Timber Timbre, Iceberg) à la réalisation, on découvre une Tricia Foster complètement dans son élément. Sa livraison saccadée de texte sans retenue se colle parfaitement aux grooves planants, aux textures rudes et aux ambiances tendues créés par les cors français d’Erla Axelsdóttir et de Pietro Amato (Torngat, Bell Orchestre, Arcade Fire). La guitare se fait discrète, la voix est croustillante, les textes mûrs sont teintés d’images éclatantes, tout comme celle qui les chante. D’ailleurs, belle surprise : sur la deuxième pièce sur l’album, D’éclats de peines, Tricia chante un poème de Brigitte Haentjens tiré du recueil du même nom.

It grows on you. C’est un album qui passerait sous le radar à une seule écoute, mais qui s’avère triomphant après l’avoir dans l’casque pendant plusieurs semaines. Négligée marque clairement une renaissance pour l’artiste qui s’installe quelque part entre de l’early Ariane Moffatt et une Betty Bonifassi pré-Beast. L’artiste plonge entre le français et l’anglais sans hoquets et sans cérémonies, comme toute bonne Franco-Ontarienne. Les deux univers ne sont qu’un seul.

Tricia Foster nous livre son album le plus audacieux et authentique à ce jour. Un album pop percutant d’une grande dame qui mange du groove pour déjeuner, qui a peur de tout mais qui s’arrête à rien et qui ne mâche pas ses mots.

Reste à voir si l’Ontarienne qui a l’habitude de trop parler en show réussira à transposer l’atmosphère monastique en spectacle. Elle fera bien ce qu’elle voudra. C’est comme ça qu’on l’aime.

À écouter et réécouter trop fort et sur vinyle.

Pour les fans de

Betty Bonnifassi, Ariane Moffatt, Torngat

Moments forts

M. Le Temps, La 17, Pendule, D’éclats et de peinte

«Vidéo moche, mais musique intéressante» – Olivier Lalande, journaliste Nightlife et le Voir. Ditto.

Lettre aux éditeurs: Pour un « Parlement franco-ontarien »

Cette lettre à l’éditeur sur la création d’un forum pour les franco-ontariens a été publiée dans plusieurs hebdomadaires des quatre coins de la province en janvier 2012Monsieur Dignard nous a contacté pour qu’on la publie sur chez nous. La voici.


Pour un « Parlement franco-ontarien »

Moi j’estime que le temps est venu de créer un véritable forum où les Franco-Ontariennes et les Franco-Ontariens se rencontreraient pour discuter de n’importe quelle question concernant le développement et l’épanouissement de l’Ontario français.  Je parle ici d’un forum où les individus (pas des représentants de groupes, d’associations ou d’institutions avec les mains liées) se pointeraient périodiquement à des endroits différents en province pour adopter des positions qui seraient dans l’intérêt supérieur de la communauté franco-ontarienne.  J’appellerais un tel forum Le Parlement franco-ontarien.

Je m’imagine une rencontre quelques fois l’an de personnes passionnées, voire désabusées, qui n’ont pas de forum et qui en cherchent un pour faire valoir des idées concernant le mieux-être des Nôtres.  En d’autres termes, il s’agirait d’une assemblée complètement libre de se prononcer sur n’importe quel volet de la situation franco-ontarienne n’importe où en province.  À mon avis, certaines résolutions prises dans ce forum pourraient faire avancer ou débloquer des dossiers importants mais stagnants en Ontario français.  Certaines propositions pourraient être récupérées par des décideurs publics (ce serait tant mieux) et d’autres résolutions pourraient même faire la leçon à certains de nos pseudos leaders politiques et communautaires.

Qui serait membre de la députation ?  Tous ceux et celles qui habitent en Ontario, qui parlent le français et qui veulent en faire partie.  Comment opérerait ce forum ?   Aucune subvention gouvernementale.  Les gens qui souhaitent assister aux rencontres paieraient toutes les dépenses de leur poche.  Si un philanthrope offrait un don sans aucunes conditions envers ce Parlement, on prendrait l’argent évidemment.  Comment s’organiserait une première rencontre ?  Quelques personnes intéressées retiendraient une date, identifieraient un lieu de rencontre, lanceraient une invitation publique et on verrait ce que cela donne comme participation.  Comment se déroulerait la première assemblée et qu’est-ce qui serait discuté ?  Les gens présents à cette rencontre le décideraient sur place.  Et s’il s’agissait d’un fiasco comme première réunion ?  Pas la fin du monde… il n’y aurait vraisemblablement pas une deuxième rencontre !

Y a-t’il des preneurs pour une première session ?

 

Serge Dignard
North Bay, Ontario


Photo: Extrait du documentaire J’ai besoin d’un nom, ONF, 1976