Le village gaulois a son université

L’Université de Hearst avec ses campus à Kapuskasing et Timmins est la seule université franco-ontarienne dans la province. Tu le savais pas? Tu regrettes de t’être inscrit à la Laurentienne ou à Ottawa? Mettons que t’as ben raison.

Mais bon, fais-toi pas d’illusions. C’est vrai que l’Université de Hearst est purement, uniquement, terriblement francophone… franco-ontarienne, un peu… mais y’a encore de la job à faire. C’est juste que c’est pas vraiment, complètement une université. Y’ont un recteur, des profs, des campus à Hearst, Timmins et Kap, toute l’affaire, ben à eux… sauf que les diplômes dépendent de la Laurentienne. Là j’te vois rire, tu t’dis « c’est une joke ». Même pas.

S’ils veulent créer un nouveau cours, ou un nouveau programme, faut qu’y passent par les hosties de comités bilingues milingues de la Laurentienne. C’est des Anglos qui parlent pas un crisse de mot de français qui approuvent toutes les affaires pédagogiques de l’Université de Hearst. Pathétique, tu penses, et t’as pas tort. Ironique et historique surtout.

C’est d’autant plus débile qu’ils ont plus de profs de littérature qu’à la Laurentienne. Ça, ça devrait créer une petite gène aux linguistes du département d’études françaises de la Laurentienne; mais non même pas, rien. Alors l’indécrottable mais honorable Raymond Tremblay, recteur de l’Université de Hearst depuis toujours (tellement qu’on penserait qu’y ferait une crise cardiaque sur son bureau) vient de faire ses adieux… pas pour toujours, juste pour prendre une retraite bien méritée et faut bien qu’on lui tire notre chapeau, lui qui a gardé le flambeau de l’éducation post-secondaire en français dans le Nord pendant toutes ces années. Bravo man!

Mais bon, un petit message à son successeur, Pierre Ouellette. Ouellette, il est pas pire comme gars… sur plusieurs plans… Mais sérieusement Pierre, si tu dois avoir un objectif, un « result-based target blabla bullshit » comme on dit à la Laurentienne, c’est de faire de l’Université de Hearst une université INDÉPENDANTE! Une vraie, la seule, l’unique, celle qui créera un vrai mouvement, derrière laquelle on sera tous mobilisés, une université franco-ontarienne. Avec plus aucun lien avec la Laurentienne.

On l’aura alors notre vrai programme de littérature franco-ontarienne… rêvons deux minutes, y’a déjà Doric Germain, et puis on rapatriera Michel Ouellette pour le théâtre (y vient pas de Smooth Rock Falls?), et on donnera enfin une vraie chance à Gaston Tremblay de partager sa passion pour la poésie, et si y veut pas s’en revenir dans le Nord, on ira chercher nos jeunes poètes de la place, parce qu’il y en a! Pis, on le développera le crisse de programme en traduction. Ça c’était un hostie coup de génie du vieux Tremblay, parce qu’à la base, la traduction quand t’y penses bien, on s’y connaît, on fait ça tout le temps, c’est génétique, on est né comme ça, ça vient plus vite qu’une éjaculation précoce pour nous. Pis on fera de l’histoire franco-ontarienne, et tout plein d’autres affaires qu’on a besoin, ici dans le Nord, pour se développer, sans les Anglais.

Alors, Pierre, mets tes culottes, et déclare l’Université de Hearst indépendante! Bonne chance, on est avec toi! (ça c’est pas forcément une bonne nouvelle pour toi… mais, regarde man, ça dépend de toi!).

Vive l’UFO, vive l’UFO LIBRE!

Ceci est un cri d’alarme.

Ce qui était supposé être une discussion sur l’implication de la jeunesse franco-ontarienne a vite viré en cri d’alarme de la génération d’aujourd’hui lors d’une table ronde à l’émission Boréal Express à CBON Radio-Canada le 26 janvier dernier.

De l’institutionnalisation de la culture au point de la rendre stérile, à la campagne « Start en français » du CSCNO qui encourage une dangereuse tendance vers la transformation de nos écoles françaises en écoles d’immersions, en passant par le tabou de la fusion des conseils scolaires pour éviter notre suicide collectif, Michel Laforge, Serge Dupuis et Christian Pelletier n’ont pas mâchés leurs mots!

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En terminant, voici une citation d’Antoine Paplauskas Ramunas dans Le Droit en 1971 qui résume bien la crise d’aujourd’hui.

« La jeunesse va toujours ressentir et rejeter un style de la vie et un système instructionnel qui, à ses yeux, semblent être trop mécanisés, dépersonnalisés, déshumanisés, unidimensionnels. Un jour, la situation de l’enseignement mécanisé et surmécanisé peut devenir explosive et même tout à fait incontrôlable, si la nécessité, l’importance, le rôle professionnel, le talent et la préparation appropriée de l’éducateur seraient oubliés ou négligés. »

— Antoine Paplauskas Ramunas, L’éducateur en 1970-2000, Le Droit, le 8 mars 1971


Image : Étudiants de Londres pendant une simulation d’attaque aérienne, 20 juillet 1940

Piano Mal : Julien Sagot

Suivant de fausses rumeurs que le célèbre groupe Karkwa (le premier groupe de langue française à remporter un prix Polaris) s’était dissous, un de ses percussionnistes et membres fondateurs, Julien Sagot a fait paraître son premier album solo intitulé Piano Mal le 1er février 2012 chez Simone Records. Je dois avouer que je ne savais pas trop à quoi m’attendre, n’étant familier qu’avec son travail au sein du groupe Karkwa.

Rapidement, Sagot nous transporte vers des paysages musicaux trop peu fréquentés. Des gros accords ouverts, disjoints et lents au piano s’opposent par moment à des petits coups de guitare rapides et secs. La sonorité de l’album crie Montréal, Paris, mais aussi un désert du Far West américain. Les mêmes genres de textes poétiques et réfléchis qu’on retrouve chez Karkwa sont aussi présents dans Piano Mal. C’est la précision des mots qui règne dans ce style d’écriture moelleux et précis.

Si certaines chansons sont lentes et éclatées, d’autres sont très rythmées et linéaires. Or, même l’oreille développée a du mal à déterminer comment l’artiste vient à bout de créer ces véritables voyages sonores, elle n’a pas l’impression de s’y perdre. Chaque son, chaque note, chaque effet sont recherchés, et aucun d’entre eux n’est utilisé de façon abusive. À tout ça, on ajoute la (superbe) voix rauque de Sagot et on obtient un produit incroyablement riche et velouté.

Bref, pour le mélomane, cet album aux textures parfois rudes, parfois lisses; aux sonorités parfois chaudes, parfois froides, est un incontournable du milieu musical actuel.

Pour les fans de

Karkwa, Serge Gainsbourg, Roger Whittaker, Ennio Morricone, Arthur H et Leif Vollebeck.

Moments forts

Piano Mal, Une vieille taupe, Le trucifier

Première correspondance : Attawapiskat et le respect

Dans cette chronique Lettres à mon fils, j’écris à Stephen Harper comme si j’étais sa mère et comme s’il avait 7 ans. Cette première correspondance a originalement été publié en décembre 2011.


Mon cher fils,

Je crois que nous devons prendre un petit moment pour discuter. J’observe ton travail ces derniers temps et j’ai l’impression que je n’ai peut-être pas réussi à te transmettre les valeurs auxquelles je tenais. Tu as fait de bien mauvais choix et le moment est venu pour moi de te rappeler quelques règles de savoir-vivre et de bienséance.

J’ai été très déçue, cette semaine, quand tu as choisi de ne pas venir en aide à tes cousins d’Attawapiskat.  Tu as de l’argent et tu as les moyens de les aider! Tes cousins du Grand Nord se contentent de bien peu pour vivre et toi, tu oses dire qu’ils profitent de ton argent!  C’est vrai que tu leur en as donné beaucoup, mais c’était insuffisant pour qu’ils puissent s’en sortir. N’oublie pas qu’ils n’ont pas la chance de vivre dans une aussi grande maison que la tienne. Dois-je d’ailleurs te rappeler que nous payons cher pour te permettre de vivre dans cette très grande maison.

Mon amour, je t’ai souvent expliqué que c’était important d’aider les autres, même ceux que tu ne respectes pas.  Maman croit que tu dois laisser tomber tes préjugés.  Souviens-toi ce que je t’ai souvent dit, nous sommes tous des êtres humains et nous nous devons un respect mutuel.

Pour t’aider à comprendre, je vais te donner un exemple.  Disons que Grand-Maman Élisabeth trouve que tu dépenses trop d’argent en jouets de guerre et qu’elle décide de contrôler elle-même ton argent. Comment réagirais-tu?  Est-ce que tu comprends mieux maintenant ce que tu fais à tes cousins du Grand Nord?

Mon chéri, tu aimes bien pouvoir faire ce que tu veux avec ce qu’on te donne. Je suis convaincue que tes cousins d’Attawapiskat aimeraient être aussi chanceux que toi.

Tu me déçois Stephen. N’oublie pas que tu dois respecter la main qui te nourrit.  Ton père et moi te donnons beaucoup et, en échange, on s’attend à ce que tu sois raisonnable et que tu partages.  Tes cousins du Grand Nord ont besoin d’aide maintenant.  Je t’en prie, mon ti-loup, rends-moi fière de toi!

Bonne semaine mon poussin.

xox

Maman