Le meilleur documentaire franco-ontarien que vous n’avez jamais vu

Il y a environ deux semaines, je faisais une recherche YouTube pour le mot « franco-ontarien », dans l’espoir de trouver un vieux clip de Marie Soleil ou bien encore un vieux sketch de Volt pour mettre sur la page de taGueule en attendant le lancement imminent. Rien d’intéressant sur la première page. Deuxième page presqu’aussi plate à l’horizon.

Quand tout à coup, je tombe sur un titre qui m’intrigue. « J’ai besoin d’un nom (1978) documentaire franco-ontarien ». 6 views. Mis en ligne par « ontarois ». Son seul vidéo. Aucun commentaire. En ligne depuis une semaine.

J’ai vu des vieux documentaires sur le Québec, sur le Canada, sur l’Acadie, sur l’Ontario français, sur CANO, mais celui-ci ne me disait rien. Pourquoi j’en avais jamais entendu parler?

La mythologie franco-ontarienne

La décennie des années ’70 a une place importante dans l’histoire canadienne, québécoise, et franco-ontarienne. C’est là qu’on arrêté d’être canadiens-français, qu’on est devenu autre chose, qu’on a eu un drapeau, et qu’on attendait de voir ce qu’allaient faire nos cousins québécois, sans trop savoir ce que ça voulait dire pour nous. Mes parents, comme ceux de plusieurs gens de mon âge, ont vécu cette époque, mais je n’en connais que quelques anecdotes ici et là; la première Nuit sur l’étang, la création du drapeau franco-ontarien, une soirée passée à écouter tous les albums de Charlebois. En fait, c’était souvent des choses que j’apprenais à l’école et je demandais par la suite à mes parents leur version des faits.

Where have you been my whole life?

Mais là, j’avais devant moi un document d’une authenticité indiscutable (production de l’ONF) et d’une importance capitale. J’étais sérieusement abasourdi, en tant que franco-ontarien, étudiant en communications, et documentaire-ophile, que j’avais jamais entendu parler de ce film.

J’ai regardé le premier 5 minutes, et j’ai compris immédiatement que ce n’était pas le genre de film à regarder de façon distraite en regardant le hockey. J’ai tout de suite fait parvenir le lien à quelques autres collaborateurs de taGueule et j’ai fermé mon ordinateur, avec la ferme intention de m’enfermer dans mon sous-sol pour pouvoir me concentrer sur le film.

What the fuck?

Et j’ai été jeté à terre. Complètement. J’ai été en tabarnak toute la semaine après ça. Complètement outré. Ce film, c’est le genre de film qu’on devrait nous montrer au secondaire. Au Québec, on leur enseigne le Refus global, la Révolution tranquille, Speak White

Me semble que la moindre des choses serait de nous montrer ce film.

En gros, c’est un documentaire sur une réunion de l’ACFO à Sudbury, en 1976. Cette réunion sert de trame de fond au film, qui prend la forme d’un habile montage d’entrevues avec des intervenants parfois pertinents, parfois risibles, toujours percutants. Je veux même pas en dire plus.

Regardez le film. Pour l’amour de tout ce qui est franco-ontarien, regardez ce film. Faites-le circuler, parlez-en, n’importe quoi.

It’s when I remember who I was that I can’t remember who I am

Ce qu’on comprend en regardant ce film, c’est que les déboires actuels de l’Ontario français par rapport à l’assimilation, à la politique, et à la culture elle-même remontent à cette époque. Malgré tous les acquis de la communauté depuis 1978, les questions soulevées par le film sont toujours extrêmement pertinentes, et on n’y a pas encore trouvé de réponse. On a toujours besoin d’un nom.

Le disque compact (1982-2012)

C’est dans un silence sidéral et numérique plus tôt cette nuit que la famille et les amis du Disque Compact ont confirmé sa mort. Monsieur Disque Compact, CD pour les intimes, est mort après une longue maladie industrielle et commerciale. Inconscient depuis des lunes, il n’aurait pas souffert, sauf de l’ouïe. Il avait 30 ans.

Conçu aux Pays-Bas en 1978 avant de naître en Allemagne en 1982, Disque Compact s’est fait connaître avec l’album 52nd Street de Billy Joel, le 1er octobre 1982. Reconnu initialement pour sa qualité sonore impeccable et inusable, il n’a pas pu garder les promesses de sa jeunesse. On s’en souviendra surtout pour son incroyable vélocité au frisbee, son manteau de cellophane qui a fait sacrer tous ceux qui ont voulu le déshabiller rapidement, et le sport qu’il inventa : la course vers le lecteur pour faire next quand il se mettait à sauter comme un cabri caféiné.

Un nuage plane au-dessus de cette mort annoncée à cause d’une enquête policière qui est présentement en cours pour déterminer les véritables causes du décès. Téléchargement, piratage, l’irruption de iTunes sont au nombre des hypothèses émises par l’industrie du disque. La plus probante, soutenue par des mélomanes, serait un suicide provoqué par la nouvelle répandue par Neil Young que Steve Jobs, créateur du célèbre iPod d’Apple, et amateur de long jeu, n’écoutait strictement que des vényls à la maison.

CD est précédé dans la mort par : le minidisque (1992-2011), la cassette (1963-1997), la Elcaset (1976-1980), la cartouche 8-track (1959-1981), le cylindre phonographique (1877-1907). Le défunt laisse dans le deuil ses frères et soeurs : le MP3, le AAC et le vinyle (qui est ressuscité des morts vers 2001 suite à l’introduction de l’iPod d’Apple).

Aucun service funéraire n’est planifié. Mais CD sera enterré dans un musée du son lors d’une cérémonie agrémenté par un concert de tables tournantes et un set de DJ diabolique.

Gabrielle Goulet, la Marie Mai franco-ontarienne

C’est juste pas bon.

Ce premier EP de la franco-ontarienne Gabrielle Goulet est produit par Michel Bénac du groupe Swing et ça paraît. C’est de la grosse pop quétaine surproduite et mal écrite. Mon iTunes a planté cinq fois en essayant de faire jouer l’disque. Je le blâme pas.

J’ai pu écouter la pièce Arc-en-ciel avant qu’iTunes dégosse une première fois. Arrivé à mi-chemin dans la seconde pièce, Ta voix, iTunes a fait une autre crise. C’est pas grave. Break.

Je réécoute Ta voix d’un boutte à l’autre. J’vais y donner une chance quand même!

Ta voix me chatouille en dedans
Je suis sous ton charme, et je dois te laisser savoir, je dois te laisser savoir…
Je tombe pour toi et ta voix dans le noir me chante tout le temps
Je tombe si fort et je dois te laisser savoir, je dois te laisser savoir…

Muah ha ha ha hein ha ha hein ha ha…

Me laisser savoir quoi? Fini tes phrases!

C’est de la pop. De la pop, c’est de la pop. On sait toute que c’est de la pop. Même elle sait que c’est de la pop. Elle est la Justin Bieber, la Selena Gomez, la Hannah Montana franco-ontarienne.

Aveux: j’aime beaucoup la musique pop. De la bonne musique pop. Mais ça,  c’est pas de la bonne pop. C’est une mauvaise imitation d’un genre amaricain qui est mécanique, agaçant et tout simplement plate. Ça sent l’Swing à n’en plus cracher. Chaque chanson est une photocopie médiocre de la précédente, comme si la machine manquait d’encre.

Arrivé à la piste 3, Dans tes bras, je commence quasiment à me sentir mal pour elle. Je me pose de sérieuses questions: comment est-ce que quelqu’un peut produire quelque chose comme ça sans que personne ne lui dise que c’est pas bon?  La réponse à cette question révèle un encore plus grand problème en Ontario français. Le manque de vrai critique. Il faut qu’on arrête d’appuyer la médiocrité si on veut produire des artistes qui ont de l’allure. Mais ça, c’est un autre billet.

Je comprends qu’il faut bien « supporter la relève » mais là, à quel prix?  Qu’est-ce qu’on est en train d’envoyer comme message?

Gabrielle Goulet a du chemin à faire et est loin d’avoir fait ses preuves. Fais-toi une faveur : laisse faire les feux d’artifice, débarrasse-toi de Bénac et trouve ta voix.

Arrivé à la fin de Petite fille, la dernière pièce de l’album, mon iTunes plante pour la dernière fois.

J’éjecte le disque. J’en ai entendu assez.

Pour ceux qui aiment

Star Académie, Justin Bieber, des gilets polos franco-ontariens.

Je ne suis pas une animatrice de la FESFO

Un beau jour d’été, il n’y a pas tellement longtemps, j’ai découvert une nouvelle facette de la francophonie ontarienne. Non, ce n’est pas celle du Notre Place, ni celle du drapeau franco-ontarien. La richesse culturelle franco-ontarienne ou canadienne-française ne se limite pas à la tire de la Sainte-Catherine, aux tartes au sucre ou aux tourtières.

Non, je ne suis pas animatrice de la FESFO et je ne vois pas le monde qu’en vert et blanc. Moi qui souhaitais tellement m’intégrer à ce monde en mouvement n’étais pas satisfaite par la francophonie qu’on m’avait présentée à l’école. Elle me contraignait dans ma volonté de me brancher à ma société. En étant tellement retournée vers elle-même, dans le but de se protéger, elle me semblait stérile et stagnante! Cette francophonie ontarienne était à mes yeux figée dans le temps et défendue par les nostalgiques du « bon vieux temps ». Ses structures et institutions, malgré qu’elles avaient l’air de m’ouvrir la porte afin que je puisse m’insérer et participer, ne voulaient pas changer leur vieille façon de faire et blâmaient le manque de progrès de la jeunesse paresseuse.  Je ne m’y reconnaissais plus.

Le blâme qu’on m’a mis sur les épaules m’a repoussée d’autant plus de la langue et de la culture plutôt que de m’attirer vers elles. Ce n’est pas de ma faute si je ne connais pas le bon mot français pour m’exprimer, ce n’est pas de ma faute si mon milieu quotidien est anglophone! On me présente la « Barbie » francophone, imperfections linguistiques non incluses, qui emploie toujours un français standard en assistant sans faute à tous les Jeux franco-ontariens au secondaire et on s’attend à ce que je suive ce bon exemple irréaliste. Elle est toujours souriante et confiante, elle a toujours eu ses services en français, elle n’a pas eu de difficultés à faire ses études en français, elle te regarde avec conviction, mais elle cache quelque chose. Derrière son bonheur éternel plastifié, il y a un vide. Ce conditionnement linguistique et culturel se traduit par une chaîne d’assemblage continu d’abandon éventuel de cette identité.

Peu importe le nombre de messages préenregistrés qu’elle récite avec toujours autant d’ardeur que la première fois qu’on me l’a présentée, je refuse d’accepter cet endoctrinement! Une bonne franco-ontarienne connait toutes les paroles du Notre Place! Une bonne franco-ontarienne travaille à éliminer les anglicismes dans son français oral! Elle ne sait pas qui elle est, ni même vraiment pourquoi elle récite ces vers. C’est peut-être pour se convaincre de sa marque, de son appartenance. Ce voile identitaire ne me représente pas; il est surréel, il est inatteignable, il est vide de sens.

C’est une commercialisation du « franco-ontarien » qui me révolte. Les jeunes se découragent devant cette distorsion de l’idéal franco-ontarien, ils sont dégoutés même. Quel manque de vie! Quel manque d’esprit et d’humanité!

J’existe, je vis, je suis le produit de mes réalités et ma langue est loin d’être parfaite. Ça ne veut pas dire que je ne suis pas consciente de mes erreurs ou que je n’essaie pas d’améliorer mon niveau de langue, mais libérez-moi de la honte de ces fautes afin que je puisse rester motivée et continuer d’apprendre. C’est décourageant d’intérioriser tout le blâme de ne pas être « au niveau » dans sa propre langue, de ne pas avoir les outils afin de s’exprimer pleinement dans celle-ci et ce, toute seule. Les découragés décrochent et les autres ne sont là que pour augmenter leurs chances d’avoir un boulot, mais ne sommes-nous pas plus qu’un avantage comparatif sur le marché du travail et quelques réminiscences canadiennes-françaises?

J’ai découvert que je n’étais pas la seule à déplorer la stagnation de la culture franco-ontarienne, qu’il y avait encore des organismes culturels qui étaient toujours pleins de vie, alimentés du happening francophone du Canada et d’ailleurs. Cette identité n’est qu’une facette de la francophonie mondiale, nous pouvons à la fois être franco-ontariens, canadiens-français et citoyens du monde.

J’ai arrêter d’écouter les albums de Swing en répétition, la seule musique francophone que je connaissais à un moment donné, car je me sentais mal d’écouter de la musique en anglais de peur de ne pas faire un « assez grand effort ».

C’est par les vers de Patrice Desbiens, de Daniel Aubin et les textes de Konflit que je baigne dans les ombres de la francophonie. Je me comprends mieux. Je peux refuser de me soumettre à cette stérilité identitaire franco-ontarienne, enfin je peux respirer!

Je peux respirer en étant consciente de la fragilité identitaire et linguistique du lys qui a grandi parmi les roses. Ça me rassure et me donne de l’espoir : j’ai le droit de simplement vivre en français et ne pas avoir à monter des barricades pour survivre en français. J’ai un point d’accès, la vraie francophonie ontarienne, organique comme elle l’est par laquelle je peux m’identifier.

J’y suis d’autant plus attachée puisqu’elle se distingue du « fais un effort » parce qu’on va te nommer « étoile du mois » si tu parles en français assez souvent dans la cour d’école. Cette nouvelle perspective de la francophonie et de ma place au sein d’elle en Ontario, au Canada et ailleurs, me parle et me représente mieux. Je la comprends, je la vis. Elle est authentique, spéciale, je veux la développer. Je suis prête à y mettre du temps, ce n’est plus un fardeau.

Je constate qu’elle évolue, qu’elle change avec le temps, qu’elle est dynamique. Elle ne me contraint plus, elle m’enrichit et mon avenir est d’autant plus coloré grâce à elle. Maintenant que je me retrouve à avoir un meilleur sens de ce qu’est cette francophonie ontarienne, je ne veux pas la perdre de vue.

Mes nombreux collègues de classe ont décroché, il y a longtemps, mais je ne peux m’empêcher de leur souhaiter la même exposition à la véritable francophonie ontarienne, de sa place dans le Canada français, dans le Canada et ailleurs.

Nous avons perdu du temps, mieux comprendre les nuances et les moments ténébreux de la vraie francophonie est primordial dans le développement d’un plus grand attachement à cette langue et à cette culture pour tout adhérent.

Ode aux accents

Je suis québécoise et depuis peu, je travaille dans le domaine de la radio, ici, en Ontario. Mon travail exige que je fasse des efforts pour avoir un certain niveau de français. Ça va de soi, puisque ma voix et mon parler sont mes outils de travail (outils sur lesquels j’ai travaillé pendant deux ans, au collège, et sur lesquels je continuerai à travailler toute ma vie).

Depuis mon arrivée dans la province, il m’est arrivé à quelques reprises que des gens me disent être gênés lorsqu’ils parlaient avec moi parce qu’ils trouvaient qu’ils ne «parlaient pas bien français».

Amis franco-ontariens, je tiens à mettre une chose au clair avec vous, ainsi qu’avec l’ensemble des francophones et des francophiles de ce monde : arrêtez tout de suite de vous sentir mal de ne pas «bien parler français».

S’il y a bien une chose qui rend le français magnifique, c’est ses milliers d’accents provenant de partout dans le monde. Pour moi, le fait que notre langue se présente sous plusieurs formes reflète la diversité des gens qui la parlent et prouve qu’elle évolue, qu’elle s’adapte, qu’elle est vivante.

Qu’elle soit parsemée de «là, là», comme au Saguenay-Lac-Saint-Jean, ou que celui qui la parle termine ses phrases avec des «de» (franco-ontariens, vous savez de quoi je parle de), ma langue, je l’aime et je la trouve belle.

Bien sûr, il y a quand même un certain code à respecter pour ce qui est de l’écrit. Je considère qu’avoir une écriture de qualité est primordial, peu importe la langue. De toute façon, écrire et parler sont deux choses bien distinctes. Je crois toutefois qu’il faut parler le français avec notre cœur, sans avoir peur d’assumer la manière dont il a été façonné par notre histoire.

Bref, que vous ayez un accent belge, québécois, franco-ontarien ou rwandais, ce n’est pas important. L’important, c’est de continuer à parler le français, à le transmettre avec toute sa complexité et sa richesse et, d’abord et avant tout, d’en être fier.

La corde

Lors des premières conciliabules à l’origine de la renaissance de taGueule, on avait proposé qu’on s’appelle La corde. Ce texte poétique fut pondu à cet effet.


la corde
parce qu’il faut
qu’on s’accorde

en dépit du fait
qu’en effet
c’est con sa corde
celle-là la sienne
malsaine

mais la nôtre
tenue toujours à l’horizon
d’une oréalité tantôt
récalcitrante

la corde au coup de foudre
trop tôt ou tard
parce qu’on n’est pas à bout
de souffle

on sait crier
avec nos crayons de soleil

le dessin d’un destin dénudé
des désuets droits aux buts
sans bornes sur lesquelles
on pourrait se pendre
au lieu de se
répandre


Photo: Corde en tête, Etienne Revault, 1991

Il est grand le mystère de la voix

Avec un p’tit 4 heures de sommeil dans l’corps, les yeux petits comme des pois, notre ronde du chapelet médiatique de l’Ontario français a commencé à 7h20 hier matin à l’émission Le matin du Nord sur les ondes de CBON Radio-Canada dans le Nord de l’Ontario.

Claqué et pompette, on se présente en studio.  Voici ce que ça l’a donné.

Ensuite, Félix et moi on va déjeuner au Gus’s avant d’entrer chacun au boulot. Le téléphone sonne. Ah, c’est le Téléjournal Ontario maintenant. On se rencontre au bureau de Bureau au coeur de centre-ville de Sudbury pour accorder une entrevue de 40 minutes qui sera tranchée à 2 soundbites qui font 15 secondes chaque. C’est ça la game.

[button text=’ Voir le reportage au Téléjournal Ontario. Bloc 3/5 à 18:20 ‘ url=’ http://www.radio-canada.ca/audio-video/pop.shtml#urlMedia=http://www.radio-canada.ca/Medianet/2012/CJBCT/LeTelejournalOntario201202221759.asx ‘ color=’ #000000 ‘]

 

Pendant l’entrevue, Félix et moi sortons nos mobiles à chaque chance qu’on a pour suivre le fil des discussions, qui bat déjà à plein feu sur le site. It feels good.

François Boileau, commissaire aux services en français de l’Ontario, tweet sur nous :

C’est parti. Radio-Canada Internet publie un article :

Le nouveau site Internet franco-ontarien tagueule.ca est en ligne depuis mercredi matin. Il s’agit d’un espace de libre expression, où collaborent une trentaine de rédacteurs de partout au pays, mais surtout de l’Ontario. Ces collaborateurs proviennent de tous les milieux.

Selon l’un des fondateurs, Christian Pelletier, le webzine a pour objectif de susciter la discussion.

« Nous n’avons pas de plateforme où nous pouvons vraiment nous permettre de nous critiquer, puis de dire que cet album-là, ce n’est pas bon, par exemple. Ou pourquoi ne parlons-nous pas de fusion de conseils scolaires ? Je ne dis pas que c’est la direction à prendre, mais pourquoi sommes-nous complètement en train d’éviter le sujet ? Que nous soyons d’accord ou pas, qu’on en discute », déclare-t-il.

M. Pelletier est insatisfait du niveau de débat dans la communauté franco-ontarienne.

tagueule.ca renaît sous une nouvelle forme, puisqu’avant, la plateforme était un forum de discussion.

[button text=’ Consultez l’article au complet sur Radio-Canada.ca ‘ url=’ http://www.radio-canada.ca/regions/Ontario/2012/02/22/005-webzine-franco-ontarien.shtml ‘ color=’ #000000 ‘]

Ensuite, c’est Relief. J’enfile mon sports coat pour masquer les poches sous mes yeux.

[button text=’ Voir l’entrevue à Relief à 41:20 ‘ url=’ http://relief.tv/accueil/2 ‘ color=’ #000000 ‘]

 

Ma grosse face qui placote et saccade via Skype mais je m’en sors correct malgré la fatigue qui commence à avoir le mieux de moi.

Finalement, j’entre chez nous rencontrer quelques collaborateurs autour d’un verre de vin. Jour 1 tire à sa fin, mais on nous réserve une dernière surprise.

Le Voir de Gatineau/Ottawa a ramassé la nouvelle. Guillaume Moffet signe le billet S’ouvrir la gueule qui parle autant de la relance d’aujourd’hui que des vaches sacrées qui ont été sacrifiées à l’autel de taGueule entre 2004 et 2007. En voici un extrait:

Le site taGueule.ca, qui jadis, au milieu des années 2000, a été un portail d’idées 100% franco-ontarien, renaît ces jours-ci de ses cendres. Forum de discussions sociales et culturelles, il avait dans sa mire, de façon très divertissante il va sans dire, des intouchables du paysage franco-ontarien (on se souviendra du tumulte causé par un texte qui contestait la Fédération de la jeunesse franco-ontarienne ou du jour où quelques plumes critiquait la musique [sacrée] de Swing). C’était la première fois depuis des lunes qu’un discours de la marge, qui véhiculait des idées antinomiques avec le courant dit «grand public», revêtait une si grande importance et, du coup, faisait des grosses vagues polémistes et révoltées en direction des nombreuses instances qui agissent de près ou de loin auprès des populations qui s’identifient au drapeau blanc et vert.

[button text=’ Consultez l’article au complet sur Voir.ca ‘ url=’ http://voir.ca/chroniques/sur-le-fil/2012/02/22/souvrir-la-gueule/ ‘ color=’ #000000 ‘]

Ça part bien le carême. Il est grand le mystère de la voix.

La poésie! Morte ou vivante?

Récemment, une journaliste me demandait (hors des ondes) où va la poésie, comment elle se porte, si elle est morte ou vivante.

Chaque génération semble se pencher sur l’état de santé de la poésie. De temps à autre, même les éditeurs qui « osent » publier des recueils dont le tirage dépasse rarement quelques centaines d’exemplaires se posent la question. En Acadie, au Manitoba, au Québec, en Ontario, en France ou ailleurs, la situation est essentiellement la même.

La mort de la poésie ? D’une part, les pisse-vinaigre semblent s’acharner à y croire. D’autre part, peu importe la forme adoptée, la poésie fait partie de nos vies quotidiennes. Outre de grandes manifestations telles que des festivals et des salons du livre, on la retrouve dans la chanson, dans Internet, dans les cafés, dans les graffiti, voire dans des publicités qui font preuve d’imagination.

Du côté du livre

Soyons honnêtes. Avant même que paraisse un recueil de poésie, il est très souvent voué à l’échec (sur le plan financier). Somme toute, peu de gens achètent des recueils de poésie.

Dans la majorité des cas, le lecteur en puissance a lu quelques poèmes lorsqu’il était sur les bancs d’école. Il pourra peut-être nommer les Baudelaire, Rimbaud, Hébert, Miron, Giguère, Leblanc ou Dickson de ce monde, ayant oublié en grande partie ce qu’ils ont écrit. Il a une petite idée de ce qu’est un vers ou une strophe, et une vague idée du sens de la métaphore ou du calembour. Et s’il a fait des études en littérature, il se souvient peut-être du dadaïsme, du surréalisme, de l’automatisme et de la Beat Generation.

Sur le plan de la diffusion, nos médias imprimés et électroniques affichent souvent une indifférence totale et parlent peu ou pas des nouvelles parutions, comme s’il s’agissait d’une bête surannée que le présent a oubliée ou comme s’ils jugeaient que ce genre n’intéresse pas (ou n’intéressera jamais) leur marché cible.

Trop hermétique ?

Intervient souvent la notion que le poème est difficile d’accès, que l’effort n’en vaut pas la peine.

Et voilà ! Nous en sommes à « l’effort » qu’exige parfois le poème. Parce qu’une lecture rapide ne suffit pas toujours. Parce qu’il faut souvent se pencher sur le poème, le lire et le relire, le décortiquer, digérer ce « laboratoire » du dire avant de saisir ce qui régit son fonctionnement, avant de pouvoir décoder son rythme, ses sonorités, la forme de cette expression autre.

Les gens qui ne lisent pas de poésie diront qu’elle est souvent incompréhensible ou abstraite. Qu’elle aime trop se regarder le nombril.

Non, on ne lit pas un poème comme on lit un article de journal, un menu ou un livre de recettes. Dans son Traité de la peinture, Léonard de Vinci écrit : « La poésie est une peinture qui se sent au lieu de se voir. » Pour sa part, Yves Bonnefoy affirme que « le lecteur de la poésie fait le serment de l’auteur, son proche, de demeurer dans l’intense ».

Personnellement, j’ose croire qu’il suffit de se laisser bercer, de s’abandonner au moment du poème, de demeurer « à l’écoute » de ce frisson qui, parfois, nous atteint dans ce que nous avons de plus profond.

Trente secondes, pas plus !

Un jour, avant d’entamer la lecture du poème qui se trouvait devant elle, une élève du niveau secondaire m’a dit : « Quand je lis un poème, si au bout de trente secondes je suis perdue, je décroche ! »

Comment lui en vouloir ! Cette écolière n’est-elle pas le produit de son époque et de sa technologie ? Somme toute, elle ne lit pas comme ses enseignants ou ses parents…

Trente secondes. On ne joue pas ! Voilà, en moyenne, le temps que l’ère informatique nous a conditionnés à consacrer à nos lectures (peu importe le genre, la forme ou le sujet). Pas le temps de réfléchir. Et la réaction ? Dans certains réseaux sociaux, cliquer sur « J’aime » est devenu la norme, la réaction quasi obligée, surtout si on n’a ni le temps ni les connaissances pour justifier ses goûts. Et si on n’aime pas, on ignore tout simplement et on passe à autre chose.

Il est clair qu’Internet a transformé notre mode de lecture, notre façon de saisir, d’agir et de réagir… Comme bon nombre d’entre nous, les poètes sont présents dans Internet. S’ils publient et ont compris le médium (par exemple, s’ils écrivent sur un cellulaire), ils ont appris à s’en tenir à quelques caractères; s’ils ont un blogue ou s’ils font partie d’un réseau social, ils savent qu’ils se trouvent dans l’univers du plat-minute de la communication et ils se limitent à quelques vers.

« Le message, c’est le médium », écrivait Marshall McLuhan en 1964. Internet n’y échappe pas. Un vers, une strophe et soudain, le lecteur est bombardé de messages qui l’invitent à cliquer pour se rendre ailleurs. Revenir ? Relire ? Pas question. À moins, bien sûr, d’un véritable coup de foudre.

La poésie subventionnée

Comme pour presque tous les genres artistiques, la diffusion de la poésie est intimement liée aux deniers publics. Nos maisons d’édition publient des recueils de poésie grâce à des subventions gouvernementales. Nous organisons des festivals, des soirées de lecture et des salons du livre grâce à des subventions gouvernementales.

Pour sa part, le poète reçoit ses droits d’auteur (en moyenne 10 % des ventes de son recueil, qui se vend très peu). S’il participe à un salon ou à un festival, on lui offrira un cachet symbolique et on se chargera peut-être de ses frais de déplacement. S’il est en lice pour un prix prestigieux, on lui offrira peut-être une chambre d’hôtel luxueuse (question de le dépayser un peu, le temps d’une nuit) et… un cachet symbolique.

Morte ou vivante ?

Chaque année, les maisons d’édition reçoivent des centaines de manuscrits. Chaque année, des poètes de tout âge lisent devant public, publient dans Internet, enregistrent leurs textes, produisent des vidéos, tentent de trouver le moyen de transmettre la parole qui les habite.

Sans vouloir conclure

Des gens écrivent et ils sont nombreux. Il est vrai que certains publient n’importe quoi sur leur blogue, dans les réseaux sociaux… D’autres sont beaucoup plus sérieux, mais comme dans tout domaine, il faut savoir les trouver, faire un tri. D’autres encore croient à la discipline qu’impose le processus éditorial.

Non, la poésie ne se vend pas bien. Demandez à nos auteurs (rares sont ceux qui peuvent vivre de leur plume), à nos éditeurs et à nos libraires. Pour bon nombre de gens et d’agences gouvernementales, la poésie échappe à l’idée de « valeur » de notre société et de notre système axé sur les ventes et sur la rentabilité financière.

Pourtant, la poésie a son public; un public restreint, néanmoins fidèle et passionné. Et force est de constater que le poème s’agite, dans nos foyers, dans Internet, dans nos maisons d’édition, dans nos cafés. Il hurle ou il chuchote, il dénonce ou il chante. Pour le meilleur et pour le pire, il fait partie de « l’âme collective ».

Le poème. Enfant mal-aimé de la culture ? Peut-être ! Cela dit, Orphée est-il prêt à rendre l’âme ? A-t-il écrit ou prononcé son dernier mot ?


Texte paru dans le numéro 154 de la revue Liaison, hiver 2011-2012

Photo : Jeune fille thrace portant la tête d’Orphée, tableau de Gustave Moreau, 1865

Freedom Frogs

Freedom Frogs

Ça fait presque dix ans depuis que j’ai rédigé Freedom Frogs. Il paraît ici dans sa version intégrale, avec néologismes maladroits qui côtoient des anglicismes que j’ignorais. Je ne l’ai jamais vraiment modifié. À l’époque, j’étais en plein milieu de ma formation universitaire dans le presque défunt programme en Arts d’expression de l’Université Laurentienne.

Comme mon école secondaire, le Collège Notre Dame, ne s’impliquait pas du tout aux activités de la FESFO, ma conception de l’identité franco-ontarienne fut plutôt formée par les assemblées générales annuelles dans les gymnases d’école où nous chantions le Notre Place de Paul Demers à l’aide de paroles projetées sur transparents. Et, jusqu’à ce qu’on me parle de la génération CANO dans le contexte de mes cours de théâtre à l’UL, c’est tout ce que je savais des franco-ontariens. On parlait en français, on habitait l’Ontario, et on avait un drapeau.

Et je trouvais ça tellement poche. Voici donc ce à quoi ressemblait la franco-ontarienneté du point de vue d’un jeune homme qui commençait tout juste à la connaître.

GRENOUILLE!

…amphibien
symbolicon du franco-ontarien

à la fois capable de survivre
dans l’eau
sur terre

« une pluie de grenouilles »

à la fois capable de survivre
en français
en anglais

mais il a besoin
des deux

***

Il est symbole de l’évolution
de personnalités multiples

capable de faire des sauts
Immenses

produit de la terre
et de la mer
de notre mère
la terre

***

Il n’accepte pas de se faire
encadrer

Il est nomade par nature
et chante
chante
chante
chante

comme une grenouille
sautillante et bandée
je chante l’Univers

***

Je n’accepte
pas la dualité
que mes parents
m’ont inculqués

Good and Evil
French and English

***

parler en
français
c’est comme
revisiter la
tyrannie de
l’Église oppressive

… parle en français
… dit tes prières

***

rouge vert
stop and go
frog in a blender

***

comme Kermit
It’s not easy being green
en amour avec
la grosse cochonne
superstar

en amour avec
la grosse cochonne
capitaliste

***

il l’hait tellement
leur union nous
semble innaturelle

***

Miss Piggy
you fucking capitalist piglet
I hate your fucking
posing
preening

tu me fais crier
!!!

je change le poste
quand je te vois
et je manque le drumbeat
solo
tribal
animal

d’Animal!
Animal!
Animal!

***

Its not easy being green…
HULK SMASH PUNY HUMANS

***

Freedom Frogs

patates frites
freedom fries
patates frites
freedom fries
patates frites

Freedom Fries
(this is your brain
on America)

***

patates
de la fiction
frites de la
friction
de la passivité
du Couch Potato

monsieur patate
peut changer son visage
monsieur patate
peut changer son lang(u)age

***

monsieur patate
et les
potato kids
se prostituent
sont devenus
des prostitués

le sac à patates
déchiré
troué
ne sert plus
aux courses
de mon enfance
staccato

***

Freedom Frogs Sold Here

on m’a
vendu
ma liberté
on m’a
libéré
du Potatohead
américain
anglo-saxon

on m’a tranché
la gueule
me coupant
la langue

je me souviens

***

je suis l’enfant
de Kermit le franco-frog
et de Miss Piggy
la cochonne
capitaliste
hollywoodienne

elle l’aimait
il était Vert
comme l’argent

***

(les Muppets
sont un produit
des années 80
l’argent était
verte
nous vendait
une nature
l’Interac
n’était qu’un
concept
spermatoco-informationnel)

***

trop de grenouilles
bondissent
comme des moutons
saute-mouton
par dessus le
précipice
d’un Principe

allez vous-en
je vous salut

***

parle en français
parle en français
parle en français

tu crains
et tu te plains
ta crainte
deviens une plainte
deviens terreur
deviens terrorisme

shut the fuck up
fuck off and

evolve

***************************************

j’avale les moustiques
qui survolent vos têtes de cochon

***

ok sure
pas de problème
si les french fries
deviennent freedom fries

no problem

nous les french frogs
devenons the freedom frogs

nous les amphibiens
qui respirent la vie
entre deux mondes

les grenouilles de la liberté

***

la grenouille est au freedom frog
ce que le tétard est
à la grenouille

***

petit tétard
qui ose
pousser des jambes
pour sauter
pour grimper

pour quitter
la soupe primordiale

***

il a le front
il a le courage
il ose d’être amphibien
de devenir un mutant
d’explorer deux univers
en même temps

***

are you a french frog
or a freedom frog

es-tu tétard
es-tu grenouille

***

j’avale les moustiques
qui survolent vos têtes de cochon

***

comme une peste sur l’Égypte
les grenouilles sont guerrières

green grenades go
pull the pin on freedom frogs

***

grenouille crucifiée
freedom frog assassiné

offrande au multivers
multilingue et polyglotte

offrande aux dieux
extra-terrestres et amphibiens
qui voyagent l’étang
de notre inconscient
collectif

sur des objets flottants
des nénuphars
non identifiés

je suis un freedom frog
anthropomorphique
à la recherche d’un rêve
d’un songe
d’une vision
qui m’échappe
comme un maringouin
comme un moustique
mystique

***

grenouille de la liberté
hibernenvoloppée
dans la belle bouette
de la marée
morte

au fond du marais
monosyllabique
de ma langue maternelle

***

le franco geek se cache-cache
des crapauds
qui font de moi la caricature
d’une grenouille
peureuse

se précipitant
comme une précipitation amphibienne
mes frog legs
se feront frire
saveur d’un souvenir
qui ne vient que de temps en temps
freedom frog style

***

on se libère des mains
de notre capteur
suivant la lueur d’un feu de camp
les braises nous embrassent
font siffler le sang
les rêves s’évaporent

***

un cauchemar crapaud
s’évaporêve

un crapaud qui creuse
le cauchemarais de l’hivernationalité
se requestionne l’hiver

la saison des songes

***

au lieu d’enfiler tuque mitaines
raquettes bas de laine
j’oublie mes mots
vice et versa versant
des larmes

faisant le deuil de la dichotomie
freedom franglaise

***

pourquoi parler parce que
ta langue est sclérosée
comme des plaques d’immatriculation
mes mots se répètent comme
des répliques

je me souviens
yours to discover
je me souviens
yours to discover

yours to remember
je me découvre
je ne découvre

rien que mots moumounes
rien que maux de tête
rien que le vide
d’un marais maternel
stagnant

***

hisse et hausse ton drapeau
une fois par année
la nuit sur l’étang
comme la messe de Noël

les enfants ont hâte de partir

***

j’avale les moustiques
qui survolent vos têtes de cochon

***

j’ai l’âme amphibienne
ici dans le nord
une nuit sell out sur l’étang
n’assouvit plus
la soif du premier marais

je chante pour les touristes
qui visitent le musée de
notre culture de
notre culte

sur l’étang de l’espace-temps
les moments nénuphars
sont nombreux

nous permettent
de visionner notre parcours
comme un jeu
de connect the dots

ils nous demandent de saluer
le drapeau franco-ontarien
comme on se prosternerait
devant un crucifix

***

j’avale les moustiques
qui survolent vos têtes
de cochon

***

le croassement de la création
fait résonner les barreaux
de notre prison invisible

culture de musée

invisible mais écrasante
invisiblement omniprésente

freedom frogs on display
tonight

do not feed the animals

ne donnez pas à manger
à boire de l’espoir
ne donne pas à croire
aux enfants bâtards

aux amphibiens potentiels

don’t put me in a cage
don’t keep me from the water
bye bye l’étang
l’océan m’attend

je ne serai ni traître
ni ton ambassadeur

bye bye l’étang
l’océan m’attend


Image : GO FU par Michael Dumontier et Neil Farber

Piano Mal : Julien Sagot

Suivant de fausses rumeurs que le célèbre groupe Karkwa (le premier groupe de langue française à remporter un prix Polaris) s’était dissous, un de ses percussionnistes et membres fondateurs, Julien Sagot a fait paraître son premier album solo intitulé Piano Mal le 1er février 2012 chez Simone Records. Je dois avouer que je ne savais pas trop à quoi m’attendre, n’étant familier qu’avec son travail au sein du groupe Karkwa.

Rapidement, Sagot nous transporte vers des paysages musicaux trop peu fréquentés. Des gros accords ouverts, disjoints et lents au piano s’opposent par moment à des petits coups de guitare rapides et secs. La sonorité de l’album crie Montréal, Paris, mais aussi un désert du Far West américain. Les mêmes genres de textes poétiques et réfléchis qu’on retrouve chez Karkwa sont aussi présents dans Piano Mal. C’est la précision des mots qui règne dans ce style d’écriture moelleux et précis.

Si certaines chansons sont lentes et éclatées, d’autres sont très rythmées et linéaires. Or, même l’oreille développée a du mal à déterminer comment l’artiste vient à bout de créer ces véritables voyages sonores, elle n’a pas l’impression de s’y perdre. Chaque son, chaque note, chaque effet sont recherchés, et aucun d’entre eux n’est utilisé de façon abusive. À tout ça, on ajoute la (superbe) voix rauque de Sagot et on obtient un produit incroyablement riche et velouté.

Bref, pour le mélomane, cet album aux textures parfois rudes, parfois lisses; aux sonorités parfois chaudes, parfois froides, est un incontournable du milieu musical actuel.

Pour les fans de

Karkwa, Serge Gainsbourg, Roger Whittaker, Ennio Morricone, Arthur H et Leif Vollebeck.

Moments forts

Piano Mal, Une vieille taupe, Le trucifier